12.12.09

pathologie hypophysaire

Céphalées trigémino-autonomiques symptomatiques

Les céphalées trigémino-autonomiques (CTA) sont incluses dans les céphalées primaires de la classification de l’IHS et regroupent l’algie vasculaire de la face, l’hémicrânie paroxystique et le syndrome de SUNCT. Si le caractère primaire de la céphalée fait partie de la définition, un certain nombre d’observations met en évidence des lésions focales même si le rapport avec ces dernières n’est pas toujours facile à prouver.
Les auteurs passent en revue la littérature et identifient 40 cas de CTA secondaires (en majorité des observations d’AVF et de SUNCT). Dans la plupart des observations, des éléments cliniques orientaient vers une étiologie secondaire : anomalies à l’examen clinique, réponse thérapeutique partielle ; cependant un certain nombre de cas pourtant symptomatiques avaient une séméiologie clinique typique. Dans un pourcentage élevé, l’association se faisait avec une pathologie hypophysaire.
A l’hypothèse initialement proposée d’un lien en rapport avec la localisation anatomique de l’adénome, la possibilité d’une piste biochimique sous-jacente a été proposée. L’IRM cérébrale est la méthode de choix d’explorations des CTA, mais les auteurs ne recommandent pas la réalisation d’une IRM chez tous les patients porteurs de TAC ; ils proposent de réaliser un interrogatoire précis sur les symptômes pouvant orienter vers une pathologie hypophysaire et de ne réaliser une IRM que chez les patients avec une symptomatologie atypique ou une réponse thérapeutique médiocre.

L’existence de cas symptomatiques se traduisant par une séméiologie tout à fait typique de CTA a été confirmée en 2009 par l’équipe de Michel Ferrari, dont les dernières publications ne sont pas mentionnées dans cette revue de la littérature. Mais l’existence de ces observations supplémentaires doit faire changer, à notre sens, la conclusion de cet article et faire proposer, dans l’attente de la réalisation d’une étude prospective, la réalisation systématique d’une IRM cérébrale.

phéochromocytome

Une céphalée inhabituelle chez une adolescente


Les auteurs rapportent le cas clinique d’une jeune fille âgée de 16 ans, qui se présente dans un service d’urgence en raison de céphalées paroxystiques évoluant depuis 48 heures. Depuis 3 ans, cette patiente s’était rendue à plusieurs reprises dans les services d’urgence en raison de céphalées du même type. Le diagnostic de migraine avait été porté malgré des atypies. Les douleurs étaient de localisation diffuse, duraient 30 à 60 mn et étaient volontiers déclenchées par les exercices physiques intenses et la miction. L’examen clinique était normal. La TA était enregistrée à 125/70 mmHg et le pouls à 65. Le scanner cérébral réalisé en urgence était normal.
Peu après son admission, cette jeune patiente développa une HTA sévère (250/140) associée à une céphalée intense. Le bilan mit en évidence une tumeur hypervascularisée située dans la vessie. Le bilan biologique montra une élévation de la norepinephrine urinaire. Le diagnostic de phéochromocytome fut confirmé par l’examen histopathologique de la tumeur. Après l’exérèse, la patiente fut libre de céphalées.

Le diagnostic de céphalées secondaires peut être difficile en urgence, surtout si le bilan neurologique est normal. L’association de céphalées et d’HTA sévère est fortement suggestive de phéochromocytome, mais celle-ci est souvent paroxystique ; le diagnostic de phéochromocytome est donc souvent difficile dans un contexte d’urgence. Ce cas clinique nous rappelle, que le diagnostic de migraine doit être porté sur des critères diagnostiques précis et doit prendre en compte tous les éléments d’anamnèse.

Attaque d’auras : attention à l’hémorragie méningée focale

Attaque d’auras : attention à l’hémorragie méningée focale…



Izenberg et ses collaborateurs rapportent une série de quatre observations concernant des sujets âgés (entre 68 et 85 ans), qui ont présenté des auras migraineuses essentiellement sensitives récurrentes sur une brève période en rapport avec une hémorragie sous-arachnoïdienne focale.
Les auteurs développent les arguments cliniques ayant permis de différencier les auras migraineuses à répétition d’une répétition d’AIT témoignant d’un « syndrome de menace », qui avait été le diagnostic initialement porté chez ces patients. Ils spéculent ensuite sur l’étiologie de ces hémorragies méningées, qui n’étaient pas anévrysmales et auraient pu être secondaires à une angiopathie amyloïde.

Cette brève communication est intéressante et doit nous conduire à être très prudents face à ces patients âgés, qui nous sont adressés pour des auras à répétition. La réapparition des auras migraineuses « en salve » est considérée comme classique chez les migraineux âgés avec aura. Elle devra dorénavant nous conduire à une analyse fine de l’imagerie, afin d’écarter une petite hémorragie sous-arachnoïdienne focale.

23.11.09

L'algie vasculaire de la face

(cluster headache)

Vous trouverez une description de l'AVF donnée par le Dr Visy et le Pr Bousser sur le site de Orphanet : description de l'AVF en français ou text in english ou un résumé du texte descriptif de l'AVF.

Nous vous recommandons la lecture de présentations très intéressantes et très didactiques par le Dr Anne DONNET : céphalées trigémino-autonomiques et céphalées trigémino-vasculaires

L'algie vasculaire de la face (AVF) est une céphalée primaire, sans lésion sous-jacente. Elle se manifeste par des crises douloureuses intenses et brèves séparées par des intervalles libres asymptomatiques. Il s'agit d'une maladie périodique évoluant par salves de 2 à 8 semaines. Le diagnostic est fait à l'interrogatoire et s'accompagne d'un examen clinique normal.

Affection rare (prévalence autour de 0,5%) elle touche plutôt des sujets jeunes de sexe masculin. Mal connue, le retard diagnostic moyen est de 10 à 15 ans

L'age de début est le plus souvent entre 10 et 30 ans et dans 90% des cas il s'agit d'une AVF épisodique avec des périodes de 2 à 8 semaines où les crises sont quotidiennes au rythme de 2 à 3 par 24 heures souvent à heures fixes et fréquemment nocturnes. Le caractère saisonnier de la maladie est classique avec 1 à 2 périodes /an, mais les intervalles libres peuvent parfois atteindre plusieurs années.

La douleur est strictement unilatérale du même coté pendant tout l'épisode et le plus souvent d'un épisode à l'autre, de durée brève (15 à 180 minutes) s'accompagnant de signes végétatifs. Elle est maximum dans la région orbitaire mais peut irradier jusque dans l'épaule, très sévère elle est comparée à un broiement ou à une brûlure atroce. Cette douleur s'accompagne de signes végétatifs homolatéraux à type de larmoiement, rougeur conjonctivale, obstruction nasale souvent suivie de rhinorrhée , ptosis et myosis voire œdème palpébral. Enfin contrairement à la maladie migraineuse la douleur de l'AVF s'accompagne d'un fréquent état d'agitation qui peut sembler aider à supporter cette dernière.

L'AVF chronique touche 10% des patients. Soit après une phase épisodique soit d'emblée, il s'agit de crises se répétant sans aucune rémission depuis plus d'un an ou lorsque les rémissions durent moins de 14 jours.

Le diagnostic positif se fait à l'interrogatoire l'examen clinique et les examens complémentaires étant toujours normaux, parfois un œdème palpébral ou un Claude Bernard Horner peuvent persister entre les crises. Des difficultés diagnostiques peuvent survenir lors de premières crises lorsque manque le profil évolutif caractéristique ou lorsqu'il s'agit de maladie apparentées de type trigémino-autonomique telles que l'hémicrânie paroxystique chronique ou le SUNCT (Short-Lasting Unilateral Neuralgiform headache with Conjonctival injection and Tearing) mais les crises sont plus courtes et plus fréquentes que dans l'AVF. Avec la névralgie essentielle du trijumeau (V1) le diagnostic différentiel est plus aisé car la cible est différente (plutôt femme de plus de 50 ans) et la douleur située dans le territoire d'une branche du V évolue par salves de quelques secondes avec une zone gâchette dans le même territoire.

La physiopathologie fait probablement intervenir le système trigéminovasculaire (unilatéralité et localisation de la douleur, signes sympathiques et parasympathiques) et un « générateur » hypothalamique (caractère cyclique et à heures fixes des crises suggérant un rythme circadien via la mélatonine et l'acide gamma-aminobutyrique).

Le traitement se divise en deux parties, le traitement de crise qui vise à soulager la douleur et le traitement de fond dont le but est de diminuer la fréquence des crises voir de repousser les périodes.

* En traitement de crise seuls deux traitements ont fait la preuve de leur efficacité en double aveugle contre placebo : le sumatriptan injectable et l'oxygénothérapie au masque. Le sumatriptan 6 mg en injection sous-cutanée (Imiject® dans l'AVF sur ordonnance de médicament d'exception) calme la crise en 5 à 10 minutes. Il s'agit d'un agoniste des récepteurs à la sérotonine de type 5HT1B/1D qui entraîne une vasoconstriction, il est donc formellement contre-indiqué en cas d'antécédent de coronaropathie, d'infarctus cérébral, d'artérite des membres inférieurs, de syndrome de Wolff Parkinson White, d'HTA non contrôlée et de syndrome de Raynaud. La dose maximale recommandée d'Imiject est de 2 injections par 24 heures. Cependant certains patients ont plus que 2 crises par 24 heures (jusqu'à 8 à 10) ce qui pose le problème d'augmenter la dose journalière de sumatriptan, d'associer un autre traitement de crise, ou de trouver un traitement de fond efficace. Le second traitement de crise d'efficacité démontrée est l'oxygénothérapie au masque (7 litres/mn pendant 15 mn). Ce traitement est à proposer systématiquement en cas d'échec ou de contre-indication au sumatriptan, par ailleurs, il est très utile en cas de crises quotidiennes fréquentes.

* Le traitement de fond vise à diminuer la fréquence des crises lors des épisodes ou au long cours en cas d'AVF chronique. Il n'est pas obligatoirement nécessaire chez les patients ayant des épisodes courts avec peu de crises répondant bien à l'Imiject. Il faut veiller à la compatibilité entre traitement de crise et de fond. Le vérapamil (Isoptine®) bien que considéré actuellement comme le plus efficace n'a pas l'AMM dans cette indication. La posologie usuelle est de 120 mg 4 à 6 fois /jour. Un ECG est nécessaire avant d'instaurer le traitement pour éliminer un bloc auriculo-ventriculaire (contre-indication). La tolérance est généralement bonne même à ces doses, et les effets secondaires (constipation, oedèmes des membres inférieurs ou hypotension) sont rares. Dans une AVF épisodique le traitement est discontinue pour une durée équivalente à celle des épisodes précédents. Le carbonate de lithium (Téralithe®) est utilisé hors AMM à la dose moyenne de 750 mg/jour. La lithémie ne doit pas dépasser 0,9 mEq/l. C'est le traitement de choix des formes chroniques. Le méthysergide (Désernil®) n'est plus guère utilisé puisqu'il s'agit d'un vasoconstricteur contre-indiquant l'administration de sumatriptan en traitement de crise. L'indométacine (Indocid®) a parfois un effet remarquable à 200 mg/jour par voie rectale. Les corticoïdes ont parfois un effet spectaculaire en quelques jours mais nécessitent de fortes doses (40 à 60 mg/jour) et la réduction des posologies s'accompagne souvent d'une récidive des crises. Certains auteurs proposent l'injection de corticoïdes au niveau de l'émergence du nerf occipital du côté de la douleur. L'efficacité du valproate de sodium ainsi que des autres anti-épileptiques (gabapantime, topiramate) n'a pas été démontrée dans l'AVF. Il existe des traitements non médicamenteux à réserver aux formes chroniques, sévères et pharmacorésistantes, certaines anciennes tels que les gestes sur le ganglion sphénopalatin (alcoolisation, cocaïnisation ou thermocoagulation par radiofréquence) d'autres en cours d'évaluation (lésion sélective du trijumeau par gamma unit et enfin l'implantation d'électrodes intracérébrales).

NEVRALGIE DU TRIJUMEAU.

Polycopié de Neurologie-Neuroradiologie et Neurochirurgie 2005-2006 – Faculté de Médecine de Strasbourg
NEVRALGIE DU TRIJUMEAU.
(Ph. Esposito)
Objectifs :
- Connaître la symptomatologie de la névralgie essentielle du trijumeau
- Connaître les modalités thérapeutiques
D’abord appelée « tic douloureux de la face » par ANDRE au XVIIIème siècle, puis « névralgie épileptiforme »
par TROUSSEAU, la névralgie essentielle du trijumeau désigne une douleur faciale paroxystique, intermittente,
unilatérale et strictement localisée au territoire du nerf trijumeau. Cette pathologie concerne le sujet d’âge mur
(généralement après 50 ans), avec une légère prédominance féminine (sex-ratio = 2/3). L’incidence est faible (5
nouveaux cas par an pour 100.000 habitants).
La physiopathologie reste très controversée. Deux hypothèses s’opposent : l’hypothèse « périphérique » selon
laquelle la symptomatologie est le fruit d’une atteinte périphérique du nerf trijumeau (qui explique l’efficacité du
traitement chirurgical) ; et l’hypothèse « centrale » selon laquelle il existe une activité paroxystique au sein du
système trigéminal central comparable à celle d’une crise d’épilepsie (qui explique l’efficacité des médicaments
antiépileptiques dans le soulagement de ces douleurs).
Quoi qu’il en soit, la névralgie essentielle du trijumeau se distingue par deux éléments fondamentaux :
- une présentation clinique caractéristique ;
- la normalité des examens cliniques et paracliniques.
En dehors de la présence de ces éléments, on ne peut pas poser le diagnostic de névralgie essentielle, mais plutôt
de névralgie « secondaire » en cas d’anomalies retrouvées au bilan clinique et paraclinique expliquant l’atteinte
du nerf trijumeau, ou de névralgie « d’allure trigéminale » en cas d’atypies dans la présentation clinique.
SIGNES CLINIQUES DE LA NEVRALGIE ESSENTIELLE DU TRIJUMEAU
Le diagnostic est facile dans sa forme typique et est généralement établi sur les données du seul interrogatoire. Il
repose sur l’association de quatre éléments cliniques :
I.1. Caractéristiques de la douleur
Il s’agit d’une douleur intense et paroxystique, le plus souvent à type de décharges électriques, ou parfois de
sensations de broiement, d’étau ou d’arrachement. Les accès douloureux sont brefs, durant quelques secondes, et
peuvent se regrouper en salves qui durent 1 à 2 minutes. La fréquence de ces accès détermine la gravité de la
maladie. Entre les accès douloureux, le malade ne souffre pas, mais présente une attitude figée caractéristique du
fait de l’appréhension d’une nouvelle crise. La névralgie du trijumeau entraîne ainsi souvent une gêne sociale et
professionnelle.
I.2. Topographie de la douleur
Elle est unilatérale, toujours strictement limitée au territoire du nerf trijumeau et le plus souvent limitée à une de
ses branches (Figure 1). La branche la plus souvent atteinte est le V2 (40% des cas)., généralement dans le
Polycopié de Neurologie-Neuroradiologie et Neurochirurgie 2005-2006 – Faculté de Médecine de Strasbourg
territoire sous-orbitaire, la douleur prenant naissance au niveau de la lèvre supérieure, de l’aile du nez ou de la
gencive supérieure. L’atteinte isolée du V3 est moins fréquente (20% des cas, et se limite généralement au
territoire du nerf mentonnier. Enfin, l’atteinte du V1 isolée est plus rare (10% des cas).
I.3. Facteurs déclenchants de la douleur
Ils sont caractéristiques mais peuvent parfois manquer. Il s’agit habituellement de l’excitation directe par
attouchement ou simple effleurement d’un territoire muqueux ou cutané appelé « zone gâchette » (ou « trigger
zone » des anglo-saxons). Les accès douloureux peuvent également être provoqués par des stimuli indirects tels
que la mastication, la déglutition, la parole, le rire ou la mimique. Chaque accès douloureux est suivi d’une
période réfractaire qui dure 1 à 2 minutes pendant laquelle la zone gâchette est ineffective.
I.4. Négativité de l’examen neurologique
C’est le dernier élément sémiologique indispensable au diagnostic de névralgie essentielle du trijumeau. En
premier du moindre signe neurologique focalisé, il conviendra de poser le diagnostic de névralgie secondaire du
trijumeau et de rechercher une pathologie primaire responsable.
EXAMENS COMPLEMENTAIRES
Le diagnostic de névralgie essentielle du trijumeau est clinique, et aucun examen complémentaire n’est
nécessaire dans sa forme typique.
EVOLUTION CLINIQUE
Elle se fait sur un mode discontinu. Les périodes douloureuses sont séparées par des périodes de rémissions
spontanées qui peuvent durer plusieurs semaines voire plusieurs mois. L’évolution se fait dans la plupart des cas
vers une aggravation progressive de la maladie du fait du rapprochement des périodes symptomatiques et de
l’échappement à long terme du traitement antalgique. Certaines formes vieillies peuvent prendre les traits d’une
névralgie secondaire ou atypique, avec notamment l’apparition d’un fond douloureux permanent ou d’une
discrète hypoesthésie dans le territoire trigéminal atteint du fait de la fréquence des accès. Enfin, la
bilatéralisation est possible mais rare (5% des cas), et est toujours secondaire à une localisation initiale
unilatérale.
DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
Devant tout élément sémiologique atypique, il faudra remettre en cause le diagnostic de névralgie essentielle du
trijumeau et évoquer la possibilité de névralgie trigéminale secondaire (début à tout âge, atteinte fréquente des
trois branches, fond douloureux permanent avec éclairs paroxystiques surajoutés, hypoesthésie fréquente, signes
de focalisation neurologique à l’examen), de névralgie atypique de la face d’allure trigéminale ou d’autres algies
de la face non trigéminales telles que :
des algies vasculaires de la face (début plus précoce, douleurs pulsatiles, cortège sympathique, durée prolongée
sur plusieurs heures sans rémission, atteinte préférentielle de la région rétro-orbitaire, rythme saisonnier et
nycthéméral ;
une artérite temporale de Horton (signes locaux, cortège inflammatoire) ;
des algies faciales non névralgiques (sinusites, glaucome, iridocyclites, algies dentaires, tumeurs de la face…) ;
des algies faciales psychogènes (qui miment plus volontiers les algies vasculaires de la face).
Dans tous ces cas, le bilan complémentaire devra être orienté en fonction des pathologies suspectées, et
comprendra
Polycopié de Neurologie-Neuroradiologie et Neurochirurgie 2005-2006 – Faculté de Médecine de Strasbourg
TRAITEMENT
IV.1. Traitement médical
Comme la plupart des douleurs neuropathiques, les névralgies du trijumeau ne répondent pas aux antalgiques
usuels et sont morphino-résistants. Certains médicaments neurotropes ou psychotropes sont beaucoup plus
efficaces.
Le médicament de référence dans cette pathologie demeure la carbamazépine (Tégrétol®). La posologie
journalière sera fonction du seuil d’efficacité et de la tolérance, qui varient d’un malade à l’autre. Généralement
les doses requises sont comprises entre 0.6 et 1.8 g/j. D’autres médicaments ont également une certaine efficacité
qui autorise leur utilisation en cas d’intolérance ou d’effet secondaire gênant lié à l’introduction de la
carbamazépine (allergies, agranulocytose…). Il s’agit du baclofène (Liorésal®), de certains antiépileptiques
comme la phénytoïne (Di-Hydan®), le clonazepam (Rivotril®), ou la gabapentine (Neurontin®), de certains
neuroleptiques comme la levopromazine (Nozinan®) ou l’halopéridol (Haldol®), ou de certains anxiolytiques ou
antidépresseurs comme la clomipramine (Anafranil®) ou l’amitryptiline (Laroxyl®).
Lorsque la névralgie devient résistant au traitement médical, ou lorsque celui-ci est mal supporté, les techniques
neurochirurgicales peuvent se discuter.
IV.2. Traitement chirurgical
IV.2.1. Techniques percutanées
Thermocoagulation percutanée du trijumeau (Figure 2)
Mise au point par SWEET en 1969, elle consiste en la création d’une lésion par radiofréquence au niveau de la
portion rétrogassérienne du trijumeau. Son principe repose sur deux bases fondamentales :
- l’existence d’une somatotopie des fibres au sein du ganglion de Gasser, qui permet d’obtenir un effet
topographique sélectif de la racine correspondant à la zone douloureuse au cours d’une stimulation
directe à l’aide d’une électrode ;
- une altération préférentielle des fibres de petit calibre amyéliniques ou faiblement myélinisées A delta
et C (conduisant la sensibilité thermo-algique) par rapport aux fibres de gros calibre myélinisées A bêta
et gamma (conduisant la sensibilité tactile et proprioceptive) ;
De fait, l’application d’une lésion thermique (75-80°) pendant un temps donnée (environ 1 minute) au niveau du
nerf sensitif impliqué dans la symptomatologie, entraîne la lésion préférentielle des fibres véhiculant les influx
douloureux, avec épargne potentielle des autres modes de la sensibilité.
Une sonde (ou électrode) de thermocoagulation est introduite par voie percutanée jusqu’à l’entrée du foramen
ovale. Le repérage de la bonne position de l’électrode se fait par électrostimulations et contrôle radiologique.
Une fois la somatotopie correspondant au territoire douloureux vérifiée, la thermocoagulation est réalisée. Cette
technique ne nécessite pas le recours à une anesthésie générale mais à une simple neuroleptanalgésie, ce qui rend
Polycopié de Neurologie-Neuroradiologie et Neurochirurgie 2005-2006 – Faculté de Médecine de Strasbourg
son application possible chez des sujets âgés de plus de 70 ans. La thermocoagulation du trijumeau est contreindiquée
en cas d’atteinte occupant le territoire du V1, du fait du risque d’anesthésie cornéenne séquellaire.
Les résultats sont bons ou excellents dans environ 90% des cas. Le taux de récidives est de 5 à 10%. Des
complications sont déplorées dans moins de 3% des cas (paralysie oculomotrice, anesthésie cornéenne avec ou
sans kératite, dysesthésies pénibles, paralysie masticatrice…).
Autres techniques percutanées
La lésion peut être réalisée par d’autres méthodes que la radiofréquence, en particulier par l’injection de glycérol
dans la citerne trigéminale ou la compression du ganglion de Gasser par ballon gonflable (sonde de Fogarty).
Ces alternatives sont probablement moins efficaces que la thermocoagulation et exposent à davantage de
récidives. Cependant, elle sont grevées d’un taux plus faible de complications.
Il ressort de l’utilisation de ces techniques percutanées un problème évident : plus on veut être efficace, plus on
risque des complications gênantes. Il n’est donc souvent pas facile de trouver le bon dosage concernant
l’importance de la lésion à effectuer pour obtenir le meilleur rapport bénéfice-risque. En pratique, il semble que
plus le patient est âgé, plus la lésion doit être importante pour être véritablement efficace.
IV.2.2. Abord chirurgical direct
Il s’agit de la décompression microvasculaire ou intervention de JANNETTA (Figure 3). La présence d’un
conflit vasculo-nerveux au niveau de l’émergence du nerf trijumeau dans l’angle ponto-cérébelleux est notée
chez 97% des patients souffrant d’une névralgie essentielle du trijumeau.Bien qu’il existe également un taux
significatif de conflits chez des sujets asymptomatiques, cette quasi-constance est à l’origine de la théorie de
l’implication de ce conflit dans l’étiopathogénie de cette maladie. La lésion trigéminale serait en fait due aux
transmissions répétitives des à-coups tensionnels à chaque systole par le biais d’une artère dans la plupart des
cas, parfois d’une veine.
La technique chirurgicale consiste en l’abord direct de l’émergence du V au niveau de la face antérolatérale du
tronc cérébral, dans l’angle ponto-cérébelleux, avec règlement du conflit par éloignement du vaisseau
responsable interposition d’un petit fragment de Dacron ou de Téflon. Il est nécessaire avant l’intervention
d’avoir réalisé une IRM centrée sur la fosse postérieure avec étude en séquences CISS-3D de manière à
visualiser le conflit vasculo-nerveux.
Cette intervention est réalisée en première intention devant toute névralgie essentielle du trijumeau pharmacorésistante,
à condition que le patient soit en mesure de supporter la chirurgie. Elle est d’autant plus prioritaire
qu’elle n’empêche pas la réalisation d’une technique percutanée en cas d’échec, alors que l’inverse n’est pas
vrai.
Les résultats sont bons ou excellents dans près de 90% des cas. Le taux de récidives se situe autour de 5%. Ces
résultats sont meilleurs en cas de symptomatologie typique, en particulier en l’absence de fond douloureux
permanent surajouté aux paroxysmes.

21.11.09

ANAES

Les recommandations pour la pratique clinique ont été élaborées conformément aux règles méthodologiques préconisées par l'Agence Nationale d’Accréditation et d’Évaluation en Santé (ANAES) qui leur a attribué son label de qualité.

Les recommandations proposées ont été classées en grade A, B ou C selon les modalités suivantes :
• Une recommandation de grade A est fondée sur une preuve scientifique établie par des études de fort
niveau de preuve (essais comparatifs randomisés de forte puissance et sans biais majeur, méta-analyse,
analyse de décision, ...) ;
• Une recommandation de grade B est fondée sur une présomption scientifique fournie par des études de
niveau intermédiaire de preuve (essais comparatifs randomisés de faible puissance et/ou comportant des
biais, ...) ;
• Une recommandation de grade C est fondée sur des études de faible niveau de preuve (essais comparatifs
non randomisés avec groupe contrôle historique, séries de cas, ...) ;
• En l'absence de précision, les recommandations proposées correspondent à un accord professionnel.
Cette classification a pour but d'expliciter les bases des recommandations. L'absence de niveau de preuve
doit inciter à engager des études complémentaires lorsque cela est possible ; cependant l'absence de niveau
de preuve ne signifie pas que les recommandations élaborées ne sont pas pertinentes et

La nouvelle insuffisance vertébro-basilaire

La question posée est de savoir s’il est utile de rechercher des anomalies de l’artère vertébrale par angioIRM dans les vertiges positionnels ou lors d’accès de pseudoébriété lorsque ces deux symptômes ne sont pas associés à des signes neurologiques.
L’étude rétrospective en double aveugle a porté sur 258 comptes-rendus d’angioIRM qui avaient été demandées pour toutes sortes de raisons dont les 3 principales étaient : un accident ischémique, une pathologie carotidienne ou un anévrysme cérébral. Ces comptes-rendus ont été divisés en deux groupes : le groupe A où la description des artères vertébrales ne montrait aucune anomalie et le groupe B où au moins une artère vertébrale était sténosée ou hypoplasique (moins de 1 mm de diamètre). Chez 133 d’entre eux, il a pu être déterminé :
1°) s’ils avaient présenté des vertiges positionnels ou des accès de pseudoébriété isolés au moment ou depuis l’examen ;
2°) s’il y avait des facteurs de risque vasculaire et combien (Tableau I).
Finalement, le groupe A comptait 72 patients avec des artères vertébrales normales et le groupe B comptait 61 patients avec des anomalies des artères vertébrales. En stratifiant les facteurs de risque vasculaires, on s’aperçoit que chez les patients du groupe B qui avaient au moins 3 facteurs de risque vasculaire, 85% avaient présenté des vertiges positionnels isolés ou des accès de pseudoébriété (p=.026). Les calculs montrent que la valeur de cette constatation vaut tant pour le diagnostic positif que négatif.

La conclusion des auteurs est que les patients qui se plaignent de vertiges positionnels isolés et/ou d’accès de pseudoébriété inexpliqués et qui ont au moins trois facteurs de risque vasculaire, ont probablement une insuffisance vertébro-basilaire. Il y a donc un risque accru de survenue d’un accident vasculaire cérébral dans la fosse postérieure. Pour confirmer ce risque, ils recommandent donc de faire une étude radiographique du système vertébro-basilaire par angioIRM (sensibilité de 94%) plutôt que par Dopler (sensibilité 70%). Pour l’artériographie intra-artérielle, la sensibilité est de100%.

Prise en charge des surdités brusques

Prise en charge des surdités brusques : vers une conférence de consensus ?
Rapporté par Emilie Vormès (Vincennes) d'après la communication :
Prise en charge des surdités brusques (Pr. B. Fraysse, Dr. D.Bouccara) – 19 novembre 2004
OTO-FORUM, Tours 2004

Animé par le Pr. Fraysse (hôpital Purpan, Toulouse) fort d’une étude sur 400 patients et le Dr. D. Bouccara, (hôpital Beaujon, Paris) l’atelier sur la prise en charge thérapeutique des surdités brusques a reçu la visite rapide du Pr. Robier (hôpital Bretonneau, Tours) En plus de la comparaison des moyens mis en œuvre dans les 3 services ainsi représentés, de nombreuses questions des participants ont permis d’entamer une réflexion sur ce qui ne relève que d’habitudes liées à des traitements peut- être obsolètes et ce qui présente un intérêt réel.
Ainsi de l’hospitalisation : A Toulouse, le protocole comprend une hémodilution systématique (sauf en cas d’atteinte sélective sur les fréquences graves), ce qui nécessite une hospitalisation. A Beaujon, où l’hémodilution ne se pratique pas, la corticothérapie de première intention est prescrite en ambulatoire. Ce n’est qu’en absence d’amélioration sous 48 heures que l’hospitalisation est demandée. A Tours, l’hémodilution a été abandonnée par manque d’efficacité mais l’hospitalisation est restée, apparemment par habitude. Tous s’accordent néanmoins sur le fait que l’hospitalisation permet de limiter le nombre de patients « perdus de vue ».
A Beaujon, pas de caisson hyperbare, à Tours, le Pr. Robier est circonspect quant à son utilisation après plusieurs cas de baro-traumatismes, à Toulouse, il fait partie du protocole.
Pour l’exploration des surdités brusques, le bilan biologique, audiométrique et VNG fait l’unanimité. En revanche, dans le bilan pratiqué à Beaujon, l’IRM est systématique chez les patients de moins de 60 ans. L’étude du rapport coût/efficacité a conduit le Pr. Fraysse à plaider en faveur des PEA,- tout en rappelant que, pratiqués trop tôt, ils peuvent aggraver la surdité- et à réserver l’IRM pour un deuxième temps.
Et si Mrs. Fraysse et Bouccara sont d’accord sur une prise en charge efficace et de bon pronostic pendant les 14 jours suivant la surdité, on se souvient que le Pr. Tran Ba Huy considère que seules les 6 premières heures sont décisives.
Malgré toutes les difficultés éthiques posées par leur réalisation, on voit donc que des études randomisées sont nécessaires pour parvenir à réunir –ainsi que le souhaite le Pr. Fraysse- une conférence de consensus qui évaluera les besoins des patients, les options thérapeutiques et les contingences économiques.

pensez aussi au bilan sanguin

Déficits cochléovestibulaires à répétition : pensez aussi au bilan sanguin

Par Vincent Patron (CHU de Limoges)

Patiente âgée de 75 ans hospitalisée au mois d’avril 2008 pour une suspicion de névrite vestibulaire droite. Dans ses antécédents, on notait une leucémie aiguë myéloblastique connue depuis 2005, pour laquelle elle avait reçu une chimiothérapie 2 mois avant. L’examen clinique montrait un syndrome vestibulaire harmonieux et aucun signe neurologique associé. Une TDM cérébrale avait été réalisée car la patiente se plaignait de douleurs occipito-pariétales droites. Elle s’était avérée normale.
Les épreuves caloriques montrèrent une hyporéflexie droite (figure 1), et l’audiogramme une surdité de perception bilatérale et symétrique (figure 2). Une IRM fut réalisée et considérée comme normale. Le diagnostic de névrite vestibulaire droite fut posé et la rééducation débutée.



Huit jours après sa sortie d’hospitalisation, la patiente présenta une perte auditive droite, mais elle ne consulta pour cela que 2 mois plus tard (juin 2008) (figure 3). Deux hypothèses furent émises alors : 1) syndrome cochléo-vestibulaire droit déficitaire dans le cadre de sa LAM ; 2) multinévrite zostérienne.

En novembre 2008, lors d’une cure de chimiothérapie dans le cadre de sa LAM, la patiente présenta une surdité brusque gauche suivie le lendemain d’une grande crise vertigineuse rotatoire (durée 48 heures). L’examen montra un syndrome harmonieux gauche, les épreuves caloriques une forte hyporéflexie bilatérale (figure 4), et l’audiogramme une surdité de perception sévère bilatérale (figure 3). Le diagnostic de syndrome cochléo-vestibulaire gauche déficitaire induit par la LAM fut retenu.



Peu d’articles relatent l’association de syndromes cochléaires et/ou vestibulaires et d’hémopathies (leucémies, myélomes multiples, Waldenström…). La physiopathologie semble relever de 3 mécanismes :
- l’hyperviscosité ou leucostase (leucémies myéloïdes chroniques en phase chronique) ;
- l’infiltration labyrinthique (leucémies aiguës et myéloïdes chroniques en phase d’acutisation) par des dépôts de cellules leucémiques dans l’oreille interne chassée par la chimiothérapie puis remplacée par une fibrose (surdités progressives) ;
- l’hémorragie intralabyrinthique (leucémies aiguës et myéloïdes en phase d’acutisation).
Aucun traitement n’est consensuel : leucophérèse et/ou chimiothérapie à haute dose ont été proposées et permettraient une récupération partielle. Ce cas clinique doit nous rappeler que, pour tout syndrome cochléaire ou vestibulaire, un bilan biologique minimum doit être réalisé et contenir une formule sanguine.

L’artère vertébrale

L’artère vertébrale, cette mal-aimée

Par Jean-Pierre Sauvage (CHU de Limoges)

Comme beaucoup de cadets, l’artère vertébrale souffre de la domination de l’artère carotide, son aînée. Pourtant, le système vertébro-basilaire est impliqué dans 20% des accidents vasculaires cérébraux et parmi ceux-ci, 25% sont en rapport avec une sténose de l’artère vertébrale. C’est vrai qu’autour de cette artère, tourne la dialectique éculée du vertige vasculaire par insuffisance vertébro-basilaire (IVB) et de ses rapports avec la colonne cervicale. Mais peut-on reprocher à l’artère vertébrale d’avoir voulu se singulariser, comparée aux symptômes visuels d’une sténose carotidienne « en majesté » ?

L’insuffisance vertébro-basilaire pourrait bien revenir sur le devant de la scène.
Car même si les « Bons esprits » la nient, il est indubitable qu’un grand nombre d’accidents vasculaires cérébelleux et du tronc cérébral est précédé de vertiges isolés dans les semaines ou les mois qui précèdent. [1,2] C’est la nouvelle IVB, celle qui accompagne les facteurs de risque vasculaire et qui se manifeste par des vertiges positionnels inexpliqués. Celle qui justifie une imagerie à la recherche d’anomalies de la circulation cérébrale postérieure : hypoplasie ou sténose de l’artère vertébrale.

Certes, s’il y a une bonne circulation collatérale, un simple hypoplasie vertébrale unilatérale est incapable de provoquer à elle seule une ischémie transitoire. Mais lorsque les anomalies deviennent bilatérales ou lorsque l’artériosclérose gagne l’artère cérébelleuse antéro-inférieure, l’ischémie touche le noyau vestibulaire et la zone d’entrée du nerf cochléovestibulaire par les perforantes ou directement le labyrinthe par l’artère labyrinthique.

Peut-on espérer repérer ces patients avant l’infarctus ? Non, tant que VNS et VNG seront faits en dehors des périodes symptomatiques et que le polygone de Willis a tout provisoirement compensé. En revanche, chez un patient qui a des facteurs de risque vasculaires et qui présente de petits vertiges inexpliqués, une constellation de nystagmus positionnels verticaux purs, véritable « signe du croisement au fond d’œil » de l’oreille interne, devraient pousser à demander des investigations non invasives à la recherche d’anomalies de l’artère vertébrale et du tronc basilaire (voir l’analyse de l’article de Sami Pierre Moubayed dans la livraison de la newsletter n°14).

sumatriptan

Par Anne Donnet (AP-HM, La Timone)
Article commenté :
Unpublished clinical trials with sumatriptan
Tfelt- Hansen PC
Lancet 2009 Oct 31;374(9700):1501-2.
► Retrouvez l’abstract en ligne

Tfelt-Hansen, à la recherche des résultats d’un essai comparant sumatriptan 25 mg suppo versus ergotamine 2 mg associé à la caféine, s’est plongé dans les registres du laboratoire GSK à la recherche de tous les essais cliniques non publiés.
Dans le registre concernant le sumatriptan, 182 études n’ont pas été publiées. En particulier cinq études comparatives entre sumatriptan et un autre traitement de crise (association paracétamol et métoclopramide ou tartrate d’ergotamine et caféine) n’ont pas été publiées.
Ces études, qui remontent aux années 90 (moment de lancement du sumatriptan) démontraient pour les essais utilisant le sumatriptan 100 mg par voie orale que seul dans 1 essai, plus de 50% des patients avaient un soulagement de la crise ; dans l’essai sumatriptan par voie rectale versus ergotamine, l’efficacité du sumatriptan était nettement inférieure à l’ergotamine.

Il n’est pas question de remettre en cause l’avancée clinique qui a été obtenue avec l’arrivée sur le marché des traitements de crise de la classe des triptans, mais cette nouvelle note courte de Tfelt- Hansen pointe un problème fondamental : la non-publication systématique de tous les essais cliniques.
Il incombe à la fois à l’industrie pharmaceutique, mais également aux investigateurs de publier systématiquement les essais cliniques quelque soient leurs résultats.

20.11.09

migraine cataméniale

Cette analyse « post hoc » a évalué le frovatriptan en traitement préventif de courte durée chez des femmes présentant des migraines exclusivement en association avec les règles, c’est-à-dire survenant deux jours avant ou trois jours après le premier jour des règles, sans crise de migraine en dehors de cette période.
Les femmes ont reçu chaque traitement (placebo, frovatriptan 2,5 mg une fois par jour, frovatriptan 2,5 mg deux fois par jour) une fois pendant les trois périodes péri-menstruelles et ceci dans un ordre randomisé. Cent soixante dix-neuf femmes ayant des migraines cataméniales pures ont été sélectionnées.
Significativement, moins de femmes ont présenté des migraines cataméniales lorsqu’elles sont traitées avec le frovatriptan deux fois par jour (37,7% p<0.001) ou une fois par jour (51,3% p=0.002), que lorsqu’elles sont traitées avec du placebo (67,1%). La dose de frovatriptan reçue influe significativement sur l’efficacité (2 fois par jour versus 1 fois par jour p=0.01). Des différences significatives sont aussi trouvées pour les autres paramètres d’efficacité, mais ces résultats doivent être interprétés avec précaution dans la mesure où il s’agit d’une analyse « post hoc ».
Le frovatriptan a été bien toléré et la plupart des effets secondaires sont similaires à ceux rapportés dans les autres études avec le frovatriptan ; les plus communs d’entres eux sont les nausées, les vertiges et les céphalées.
Les auteurs concluent que le frovatriptan, en traitement préventif de courte durée, réduit significativement la survenue de la migraine mensuelle chez les femmes qui présentent des crises exclusivement en association avec les règles.

22.10.09

21.10.09

vertiges iatrogènes

Mélange implosif

Patient âgé de 62 ans adressé pour un grand vertige rotatoire survenu deux ans auparavant et présentant depuis cette date des épisodes répétitifs de vertige l’obligeant à arrêter son activité, voire à se coucher en attendant que tout disparaisse.
Dans le courrier du médecin traitant, on apprend que l’examen cardiaque était normal ainsi que le Doppler. L’IRM ne montrait pas de processus expansif de la fosse postérieure. Seul antécédent : une hypertension artérielle traitée par Célectol® et Zanidip®. Ce patient avait déjà consulté un ORL : l’audiogramme et la vidéonystagmographie avec épreuves caloriques et giratoires étaient normaux.
L’interrogatoire révéla que l’épisode de vertige rotatoire initial était survenu au cours d’un déjeuner « arrosé » en se levant pour aller chercher un plat et qu’il s’était effondré à terre. Tous les vertiges survenus depuis étaient brefs, ne duraient que 1 à 2 secondes et étaient tous suivis de syncope. Le patient se réveillait toujours dès qu’il atteignait la position allongée. Ces épisodes survenaient par exemple en sortant de sa voiture, en tordant le cou pour faire un créneau, en se relevant brutalement après avoir travaillé à genoux dans son jardin.
En vidéonystagmoscopie, il n’y avait qu’un discret nystagmus vertical inférieur sans vertige dans les positions en décubitus. Couché, la tension artérielle était à 13/08 et le pouls à 75 au bras droit et gauche. Immédiatement après le lever, la tension artérielle montait à 15/09 et le pouls à 80 au bras droit et 16/09 avec un pouls à 83 au bras gauche. Après 10 minutes de station debout, la tension artérielle retombait à 13/08. Le patient à qui on demanda alors s’il se sentait bien nous répondit qu’il ne risquait rien car il était 17 heures et que tous les vertiges avec malaises survenaient le matin.
L’examen de l’ordonnance de son médecin révéla qu’il prenait un 3e médicament : de la tamsulosine LP (Omix®), indiquée pour les symptômes fonctionnels de l’hypertrophie prostatique : un comprimé à la fin du petit-déjeuner. L’effet indésirable majeur de ce médicament est l’hypotension orthostatique pouvant conduire à des syncopes. Cet effet est potentialisé par les antihypertenseurs antagonistes du calcium, or, la lercanidipine (Zanidip®) qui se prend aussi au petit déjeuner en est un. Enfin, la lercanidipine a un effet hypotenseur potentialisé si on lui associe un bêtabloquant. Or le célopolol (Célectol®) en est un et de plus se prend de préférence avant le petit-déjeuner.
Ainsi, ces trois comprimés pris le matin avant 9 heures potentialisaient leurs effets hypotenseurs jusqu’en début d’après midi, surtout en cas de vasodilatation abdominale au cours d’un déjeuner alcoolisé. On est donc probablement en présence d’une hypotention orthostatique iatrogénique. Chez ces patients, le système autonomique réagit mal lors de la mise en orhostatisme avec bourdonnement d’oreille prémonitoire, bref vertige, vision floue, douleurs dans la nuque et le dos (« coat hanger pain »).
On décida ensemble qu’il prendrait son Omix le soir. Depuis 2 mois, les vertiges et les syncopes ne se sont pas reproduits. La présence du nystagmus vertical inférieur positionnel est plus inquiétante car elle pourrait suggérer une pathologie centrale encore infraclinique du type atrophie multiple systémique fragilisant déjà le système autonomique.

Vertiges et virus

Vertiges et virus

La névrite vestibulaire zoostérienne mérite bien l’appellation virale parce qu’on y trouve des séroconversions pour herpès zoster et qu’elle survient souvent dans le cadre du syndrome acousticofacial de Sicard. Mais d’autres affections revendiquent aussi cette origine : la neuronite ou névrite vestibulaire, la maladie de Menière et même le VPPB.
C’est que dans ces trois cas, l’étude anatomopathologique de rochers de patients décédés d’une autre cause montre au niveau du ganglion de Scarpa et du nerf vestibulaire, la présence d’une dégénérescence cellulaire avec lésions morphologiques similaires à celles rencontrées au niveau du nerf trijumeau pour le zona. De plus, l’ADN de virus herpès simplex a pu y être obtenu par amplification moléculaire (PCR).
En ce qui concerne la névrite vestibulaire, il n’est pas étonnant qu’elle revendique cette appellation virale du fait de la précession fréquente d’une affection respiratoire et de sa survenue par petites épidémies. Pour affirmer que la maladie de Menière était d’origine virale, Harolf F. Shuknecht s’est appuyé sur l’étude de rochers de patients atteints d’une forme clinique dénommée « hydrops endolymphatique retardé », véritable chaînon manquant de sa physiopathologie. Il en concluait que la maladie de Menière commençait par une labyrinthite virale infraclinique se manifestant des années après par un hydrops endolymphatique. Dans le cas des VPPB, Richard Gacek s’est appuyé sur la mise en évidence de lésions virales des nerfs utriculaire et sacculaire pour affirmer qu’il s’agissait d’un trouble des interactions entre macules otolithiques et canaux semi-circulaires.
Et pourquoi pas ? La fenêtre ronde est une passoire pour les virus en provenance du cavum. Ceux-ci gagnent la périlymphe et grâce à leur neurotropisme remontent jusque dans le ganglion de Scarpa, où ils s’installent pour la vie. De là, des récurrences donnant les mêmes vertiges, comme reviennent au même endroit les boutons de fièvre de l’herpès. Voilà pourquoi les anticorps viraux restent inchangés.

18.10.09

Idées suicidaires chez les adolescents migraineux

Idées suicidaires chez les adolescents migraineux

Wang et ses collaborateurs rapportent les résultats d’une étude épidémiologique transversale, dont l’objectif était d’évaluer la prévalence d’idées suicidaires et leurs déterminants chez les adolescents migraineux. Ce travail était une partie de l’étude épidémiologique plus large réalisée sur un effectif de plus de 4.000 adolescents taïwanais visant à évaluer les céphalées de l’adolescent.
Le questionnaire rempli par ces adolescents permettait de préciser : les caractéristiques démographiques, le type de céphalée (en utilisant un algorithme basé sur les critères diagnostiques de l’International Headache Society), l’existence d’une dépression (en utilisant un questionnaire spécialement validé pour l’adolescent) et la sévérité fonctionnelle (en utilisant la version « pédiatrique » du questionnaire MIDAS).
Cette étude a ainsi montré que 8,5% des adolescents ayant participé à cette étude rapportaient avoir eu des idées suicidaires dans le mois précédent l’étude. La proportion d’adolescents alléguant des idées suicidaires était plus importante chez les filles et pour les enfants ne vivant pas avec leurs deux parents « biologiques ». Chez les adolescents céphalalgiques, la fréquence des idées suicidaires était corrélée positivement à la fréquence des épisodes céphalalgiques et à la sévérité de la céphalée, quelle que soit la nature de cette céphalée.
Ainsi, chez les adolescents alléguant des épisodes céphalalgiques survenant entre 7 et 14 fois, le taux d’allégation des idées suicidaires était de 18% alors que lorsque les adolescents alléguaient une céphalée chronique quotidienne le taux augmentait à 28,6%. De même, les adolescents céphalalgiques alléguant un impact fonctionnel mineur présentaient un taux d’idées suicidaires de 7,5% alors que chez ceux alléguant un impact fonctionnel majeur ce taux était de 44,4%. Parmi les différents types de céphalée, la migraine avec aura était celle s’associant au taux d’idées suicidaires le plus élevé (23,9%) par rapport à la migraine sans aura (15,9%) et à la migraine probable (13,7%).
Les auteurs ont ainsi démontré que les deux principaux facteurs déterminant les idées suicidaires étaient la présence d’une migraine avec aura et la fréquence des épisodes céphalalgiques (plus de 7 épisodes dans le mois).

Ce travail est intéressant car il aborde le risque suicidaire, qui a été peu étudié chez les migraineux. Il est particulièrement important qu’il considère le risque suicidaire des adolescents qui a été récemment mis en exergue compte tenu de sa prévalence. Il montre que, comme l’ensemble de la comorbidité psychiatrique, ce risque est plus important en cas de migraine avec aura et si la céphalée primaire est très expressive. Comme cela est discuté par Hershey dans l’éditorial associé à cet article (Neurology 2009, 72 e61 e62), il serait particulièrement intéressant d’évaluer l’évolution de ces idées suicidaires suite au traitement de la céphalée primaire.

vertige aigu douloureux

Attention, vertige aigu douloureux !

Il y a des vertiges d’origine centrale sans signes neurologiques. C’est le cas présenté dans cet article, où dans une dissection de l’artère vertébrale, le vertige était isolé. Seul signe associé : la douleur.
Cet homme de 41 ans sans antécédents, en soulevant un réfrigérateur, a ressenti une céphalée occipitale droite brutale suivie d’un vertige et d’algies cervicales postérieures droites. Il ne consulta que quelques jours plus tard en raison de la persistance des symptômes et de l’apparition d’une instabilité avec nausées et acouphènes droits. L’examen neurologique était normal mais il y avait un nystagmus spontané. L’IRM ne fut demandée que parce que le vertige ne s’était pas amélioré après 48 heures de traitement médical ! Elle révéla la présence d’un infarctus dans le territoire de l’artère cérébelleuse postérieure droite. L’Angio IRM montra une occlusion complète de l’artère vertébrale. Le patient fut directement adressé dans le service de neurologie pour traitement.

Commentaire 1. L’incidence des dissections de l’artère vertébrale est de 1,5 pour 100.000. Elles représentent 25% des accidents ischémiques cérébraux de l’adulte jeune et d’âge moyen. Dans 60% des cas, les symptômes initiaux sont des céphalées ou des algies cervicales. Dans 20% seulement, ce sont des signes neurologiques en foyer et dans 20% ce sont des vertiges ou des oscillopsies. L’angiographie autrefois « gold standard » du diagnostic a été détrônée par l’Angio IRM en raison de son innocuité. Seule limite : convaincre qu’on peut demander une IRM en urgence chez un patient sans signes neurologiques parce que c’est un vertige douloureux.

Commentaire 2. Toute rotation cervicale avec hyperextension, surtout si elle est brutale et prolongée, plaque la carotide et les artères vertébrales contre le plan osseux et favorise une dissection. Par exemple après une manipulation cervicale, un plongeon, un accident de la voie publique ou simplement après avoir repeint un plafond. Par conséquent, devant un vertige aigu du type que présentait ce patient, il faut s’abstenir de manœuvres telles que : recherche de nystagmus positionnel, head shaking et manœuvres de Sémont ou d’Epley. En l’occurrence, la présence d’un nystagmus spontané était contraire au diagnostic de VPPB. On ne sait pas si ce nystagmus était de type central : pur, vertical ou torsionnel. L’auteur à plutôt l’air de se féliciter que le patient ne soit pas passé par l’ORL et ses tordeurs de cou.

agoraphobie

Agoraphobie n’est pas folie

En présence d’une personnalité névrotique, une tendance trop facile est d’évoquer un vertige psychogénique. Certains sujets sont agoraphobiques parce qu’ils se sentent ébrieux dans certaines circonstances visuelles. Par exemple, traversées de grands espaces, lumières des supermarchés, certains ciels nuageux, arbres couchés par le vent, circulation sur une route plantées d’arbres et ensoleillée. Il s’agit soit de pertes de repères soit de stimulations optocinétiques intenses interprétées comme un mouvement de soi.
Tous ces patients ne sont pas des psychopathes.
On peut d’abord considérer qu’il s’agit de conflits sensoriels entre les appareils vestibulaires et visuels par surstimulation visuelle entraînant des nausées comparables au mal de mer. Dans le terrain migraineux, il existe ainsi des sursensibilités expliquant la photophobie, la phonophobie et le mal des transports dont ces sujets sont classiquement atteints.
D’autres patients présentent une authentique lésion vestibulaire bien compensée. Mais, cette compensation a été obtenue par des substitutions visuelles. Ils sont donc beaucoup plus sensibles aux excès de ces stimuli. Il y a dépendance visuelle.
Par exemple, on a décrit le Syndrome de désorientation de l’automobiliste. Ceux-ci racontent que, surtout sur autoroute, ils ont l’impression que leur auto s’incline, change de trajectoire et n’obéit plus aux commandes. L’épisode se déroule souvent au sommet d’une côte ou à l’occasion d’un dépassement alors qu’ils n’avaient plus de repères visuels. Il peut aussi s’agir de la négociation d’une courbe ou de la rotation autour d’un rond point alors que la force centrifuge agissait sur les otolithes. Là encore, on peut se trouver devant une authentique lésion vestibulaire compensée. C’est qu’en effet, la posture non physiologique de la conduite automobile exacerbe les anomalies otolithiques en rapport avec une asymétrie vestibulaire du fait d’une déprivation sensorielle liée à l’absence de sensations proprioceptives (coussins mous, voire agités de vibrations).
En revanche, s’il n’y a aucun antécédent vestibulaire et peu de sensations d’inclinaison et de déviation, il faut rechercher des arguments en faveur d’une crise de panique : paresthésies périorales et sensations d’oppression thoracique.

Toux Chronique

http://www.pratis.com/documentation/TCToux__texte_court_2006.pdf

Introduction

La prévalence de la toux chronique a été évaluée à 6 % des consultations de nouveaux patients chez les médecins généralistes, 10 % des consultations dans un centre de santé à orientation respiratoire et 10 à 30 % des consultations de pneumologie.
La toux chronique est définie dans la littérature par une durée supérieure à 3 ou 8 semaines (grade B). Le hemmage (raclement de gorge) peut en être une forme clinique.
La présente recommandation ne concerne qu’une toux qui dure plus de 3 semaines, sans tendance à l’amélioration (choix du groupe) et survenant en dehors d'un contexte médical connu et susceptible d’être en cause (toux “native”).

I. APPROCHE DIAGNOSTIQUE DE LA TOUX NATIVE

I.1. INTERROGATOIRE ET EXAMENS D’ORIENTATION DU MÉDECIN GÉNÉRALISTE

I.1.1. Établir le diagnostic positif d’une toux chronique native sur trois critères :
Sa durée est supérieure à 3 semaines, en l’absence de tendance à régresser et sans contexte étiologique connu.

I.1.2. Évaluer son caractère invalidant
Le caractère invalidant peut être affirmé lorsqu’il existe un retentissement psychosocial (sur l’entourage familial, professionnel…) et/ou un ou plusieurs des signes cliniques suivants :
• Toux insomniante, émétisante, asthéniante,
• Fractures de côte, douleur musculaire aiguë, révélation ou majoration de hernie ou de prolapsus,
• Perte d’urines, céphalées, perte de connaissance,
• Autres conséquences plus rares (hémorragies sous-conjonctivales, bradycardie ou tachyarythmie,…).

I.1.3. Rechercher des signes de gravité
L’enquête étiologique doit être rapide et faire appel au spécialiste concerné (ORL, pneumologue, gastroentérologue, interniste, cardiologue, infectiologue ou le service des urgences) devant un ou plusieurs des signes suivants :
• Altération de l’état général ,
• Syndrome infectieux,
• Dyspnée d’effort,
• Hémoptysie ,
• Apparition ou modification de la toux chez un fumeur,
• Dysphonie, dysphagie, fausses routes,
• Adénopathie(s) cervicale(s) suspecte(s),
• Anomalies majeures de l’examen clinique cardiopulmonaire.

I.1.4. Rechercher les éléments cliniques d’orientation étiologique
Les caractères de la toux (productive ou non productive, horaire, position…) ne sont pas des éléments d’orientation étiologique spécifiques. Leur regroupement avec d’autres symptômes peut cependant avoir une valeur d’orientation initiale et guider l’ordre des investigations :
• Asthme : toux spasmodique, nocturne, au froid, à l’exercice, en cas de brouillard,
• Rhinite : antécédents de sinusite, sensation de rhinorrhée postérieure, raclement de gorge, écoulement nasal, obstruction nasale, troubles de l’odorat,
• Reflux gastro-oesophagien : survenue après les repas ou en position penchée en avant ou en décubitus.
La toux peut être multifactorielle. Une histoire évocatrice ne dispense pas d’une approche diagnostique systématique telle qu’elle est décrite ci-dessous (avis du groupe).

Certaines grandes causes doivent être éliminées :

1.4.1. Cause médicamenteuse
Une étiologie médicamenteuse est d’autant plus suspectée que le médicament est
connu comme pourvoyeur de toux chronique et que son introduction a coïncidé avec le début de la toux :
• Effet certain et fréquent : Inhibiteurs de l’enzyme de conversion,
• Effet certain : Antagonistes de l’angiotensine II (sartans), bêta-bloquants, interféron alfa 2b, thérapeutiques inhalées,
• Données restreintes de la littérature : Morphine et dérivés, méthotrexate.

1.4.2. Coqueluche
L’interrogatoire oriente vers une coqueluche en cas de contage, de toux quinteuse et émétisante, de spasmes laryngés et/ou de toux postinfectieuse, initialement banale, mais d’intensité croissante et sans tendance à l’amélioration au 21e jour.

1.4.3. Tabagisme
La consommation chronique de tabac ou de cannabis est fréquemment à l’origine d’une toux. Chez l’adulte, le rôle du médecin est de discerner le symptôme banal, conséquence de l’inflammation bronchique, de la toux révélatrice d’une bronchopneumopathie obstructive (BPCO) ou plus encore, d’un cancer des voies aériennes. Pour cela, il doit prendre en compte l’âge du patient, l’importance et l’ancienneté de sa consommation tabagique, le caractère récent, ancien ou recemment modifié de sa toux, l’existence de symptomes associés et les données de l’examen clinique.
Les causes suivantes ne sont pas présentées par ordre de fréquence, mais suivent un plan d’examen anatomique permettant une recherche étiologique méthodique.

1.4.4. Cause ORL

1.4.4.i Causes rhinosinusiennes : rhinite ou sinusite avec ou sans rhinorrhée postérieure
 L’interrogatoire recherche les symptômes d’un dysfonctionnement nasal chronique (obstruction nasale, anosmie, rhinorrhée…). La rhinorrhée postérieure isolée mérite cependant une attention particulière car si elle est associée à une toux chronique elle réalise le syndrome “rhinorrhée postérieure – toux chronique” (grade C).
 L’examen recherche une rhinorrhée postérieure, visible sur la paroi postérieure de
l’oropharynx.

1.4.4.ii Causes en rapport avec une atteinte du carrefour aérodigestif
 Une dysphonie, des fausses-routes, une dysphagie, des régurgitations d’aliments non digérés, des paresthésies pharyngées, s’ils sont associés à une toux doivent orienter la personne vers une consultation ORL.
 Des épisodes d’asphyxie aiguë fréquemment inaugurés par une toux, sans perte de connaissance, suggèrent une hyperréactivité laryngée, dominée par les spasmes laryngés.
 L’examen clinique recherche des adénopathies cervicales, un goître, une hypertrophie majeure des amygdales, une luette de longueur excessive, ou encore une thyroïde linguale. Bien que n’étant pas nécessairement responsable de la toux, l’existence d’une seule de ces anomalies doit conduire à un bilan ORL (grade C).

1.4.4.iii Causes otologiques
Elles sont dominées par les affections du conduit auditif externe mais sont
exceptionnellement en cause (grade C).

1.4.5. Cause bronchopulmonaire
L’interrogatoire recherche une exposition chronique à des aérocontaminants :
tabagisme, inhalation de cannabis, exposition à des polluants professionnels ou domestiques.
Certaines caractéristiques sémiologiques peuvent orienter le diagnostic sans pour autant être pathognomoniques :
- Toux rauque et aboyante, quinteuse, parfois émétisante de la coqueluche
- Toux avec hémoptysie dans le cancer bronchique
- Toux associée à la perception par le patient de sifflements épisodiques intrathoraciques dans la toux équivalent d’asthme
- Toux accompagnée d’expectoration muqueuse matinale dans la bronchite chronique tabagique et d’expectoration purulente (verdâtre) dans les dilatations des bronches (DDB).
L’auscultation pulmonaire recherche des signes évocateurs de pathologie bronchique (wheezing, traduisant un obstacle sur les grosses bronches, râles sibilants de l’asthme, râles bulleux et humides de la bronchite chronique) ou parenchymateuse (râles crépitants).

1.4.6. Cause gastroentérologique
L’existence d’un reflux gastrooesophagien (RGO) doit être suspectée sur la notion d’antécédent d’oesophagite et sur la présence de symptômes digestifs du reflux : pyrosis et/ou régurgitations acides ou alimentaires. Il faut souligner que 50 à 75% des personnes consultant pour une toux chronique en rapport avec un RGO n’ont aucun symptôme digestif de reflux.
En cas de dysphagie, l’hypothèse d’une obstruction oesophagienne fonctionnelle ou organique ou d’un diverticule pharyngo-oesophagien doit être évoquée.

1.4.7. Cause cardiologique
L’interrogatoire oriente vers l’origine cardiaque d’une toux si celle-ci survient à l’effort ou
en décubitus s’accompagnant dans ces deux circonstances de dyspnée.
L’examen confirme le bien fondé de cette orientation s’il retrouve une tachycardie, une
arythmie, des signes d’insuffisance ventriculaire gauche voire la cause de celle-ci (angor,
hypertension artérielle, valvulopathie).
1.4.8. Cause allergique
En cas d’allergie, la toux est due soit à une inflammation bronchique, soit à une
inflammation nasale avec jetage postérieur, soit aux deux.
1.4.9. Cause comportementale
Les causes comportementales sont à envisager en l’absence des causes médicales
décrites ci-dessus et en présence d’un comportement évocateur. Les caractéristiques de
la personnalité (phobique, obsessionnelle, complaisante, instable, revendiquant de
manière paradoxale, passive ou hostile) les caractéristiques du comportement
particulièrement anxieux ou dépressif sont à prendre en compte. Des éléments
sémiologiques de la toux (ritualisée, diurne avec une absence totale de modification du
sommeil, disparaissant spontanément de manière inexplicable, hyperventilation
associée) doivent faire penser à une cause comportementale.

I.1.5. Stratégie de prise en charge initiale par le médecin
généraliste

1.5.1. En cas d’imputabilité forte d’une cause médicamenteuse
Arrêt du médicament suspecté, en coordination avec le médecin prescripteur, pour
mettre en place un traitement alternatif. Pour les IEC, la toux doit cesser dans les 4 à 6
semaines après l’arrêt. Le symptôme doit être réévalué au terme de ce délai.

1.5.2. En cas de suspicion de coqueluche
Le diagnostic est sérologique en attendant la mise à disposition de la PCR qui seule
pourrait identifier les rares cas de persistance de Bordetella pertussis. Dans la situation
actuelle, une antibiothérapie par macrolide ne se justifie qu’en cas de nourrisson non
vacciné dans l’entourage. Elle n’a aucun effet sur la toux qui résiste le plus souvent à
tout traitement symptomatique mais se résout habituellement dans un délai de 1 à
2 mois.

1.5.3. Radiographie thoracique (face et profil)
En dehors des deux circonstances précédentes, elle est systématique. Elle objective les
opacités parenchymateuses, pleurales et médiastinales conséquentes (infection, tumeur,
atelectasie ou infarctus). Elle méconnaît certaines lésions bronchiques (DDB, bronchite
chronique), endobronchiques (tumeur de petite taille, corps étranger non radio-opaque)
ou vasculaires (embolie pulmonaire).

1.5.4. En cas de tabagisme
Chez l’adolescent, tabagique récent, la toux est un symptôme banal mais aussi un
argument pour proposer un sevrage tabagique dès la première consultation. La toux doit
disparaître avec l’arrêt du tabagisme, après une phase brève d’exacerbation. On peut en
rapprocher la toux liée à la consommation chronique de cannabis.
Chez l’adulte, tabagique chronique, la toux est un symptôme fréquent mais aussi une
circonstance de découverte d'une BPCO ou d'un cancer des voies aériennes. Elle justifie
un bilan ORL et pneumologique dès la première consultation et par la suite, en cas de
modification en dehors d’un contexte de banale exacerbation (syndrome viral,
expectoration verdâtre).
Les stratégies suivantes ne sont pas présentées par ordre de fréquence
étiologique, mais suivent un ordre anatomique.

1.5.5. En cas d’orientation diagnostique ORL

1.5.5.i En présence de symptômes rhinosinusiens :
1) Devant un syndrome rhinorrhée postérieure – toux chronique, il n’y a
actuellement en France aucun consensus professionnel pour sa prise en charge.
Au vu de la littérature, le groupe recommande l’utilisation en première intention de
bromphéniramine / pseudoéphédrine pendant trois semaines (grade C).
En cas d’échec de ce traitement, il est préférable d’adresser le patient à l’ORL
sans prescrire de corticoïdes par voie générale car ils peuvent faire disparaître
des lésions. Un scanner des sinus doit être réalisé et non une radiographie
standard (grade A).
2) Devant un dysfonctionnement nasal chronique autre, il est préférable d’adresser
le patient à l’ORL, avant toute corticothérapie par voie générale et muni d’un
scanner des sinus, pour la recherche d’une étiologie précise (par exemple :
polypose nasosinusienne, sinusite chronique, Wegener…).
L’interprétation d’un scanner des sinus nécessite une confrontation avec les
données de l’interrogatoire et de l’endoscopie nasale.

1.5.5.ii En présence de symptômes d’une atteinte du carrefour aérodigestif :
Une tumeur doit dans un premier temps être éliminée par un examen ORL. S’il existe
une suspicion de diverticule de Zenker, un transit pharyngo-oesophagien est prescrit par
le médecin traitant avant la consultation ORL.
Dans les laryngites chroniques, la dysphonie est le maître symptôme. La toux est
typiquement irritative, majorée au cours de la phonation.
Les laryngites peuvent être l’expression d’un reflux pharyngolaryngé sur un reflux gastrooesophagien
; elles se caractérisent typiquement par la présence de lésions
inflammatoires en regard de la partie postérieure du larynx (hyperhémie, granulomes,
ulcèrations) ou plus fréquemment d’un oedème (Grade C). La voix peut être enrouée et
fatigable, associée fréquemment à un hemmage, à une sensation de globus (“boule”
dans la gorge).
Les infections laryngées spécifiques responsables d’une toux chronique sont d’origine
tuberculeuse ou mycotique (candidose, histoplasmose….).
Algorithme 2 : en cas de toux chronique en présence de signe d’orientation
TVO : trouble ventilatoire obstructif, HRB : hyper-réactivité bronchique, IVG : insuffisance ventriculaire gauche, RGO : reflux gastrooesophagien, BPCO :
bronchopneumopathie obstructive .

1.5.6. En cas d’orientation diagnostique bronchopulmonaire
En cas de suspicion d’asthme, il faut assurer le diagnostic qui implique un traitement de
longue durée : épreuves fonctionnelles respiratoires (EFR) à la recherche d’un trouble
ventilatoire obstructif (TVO) réversible sous bronchodilatateurs. En absence de TVO,
une hyperréactivité bronchique est systématiquement recherchée. Son absence élimine
le diagnostic d’asthme. Sa présence renforce la suspicion de toux équivalent d’asthme
mais ne l’affirme pas (grade A). Elle légitime néanmoins un traitement d’épreuve de la toux par un traitement spécifique de l’asthme (corticoïde et/ou bronchodilatateur inhalés)
(grade C).
En cas de suspicion de BPCO, deux mesures s’imposent : pratiquer des EFR qui
permettent de déterminer le stade d’obstruction bronchique (classification GOLD) qui
conditionne la prise en charge (grade C) et convaincre le patient de l’intérêt d’un sevrage
tabagique, seule mesure réellement efficace contre la toux (grade A).
En cas de suspicion de cancer bronchique (toux de modification récente et inexpliquée
chez un fumeur) ou d’une autre affection bronchopulmonaire, le patient doit être adressé
en consultation spécialisée (grade C).

1.5.7. En cas d’orientation diagnostique gastroentérologique
Devant des symptômes digestifs de RGO (pyrosis, régurgitations), les indications de
l’endoscopie, avant d’instituer un traitement, dépendent de l’existence ou non de signe
d’alarme (dysphagie, amaigrissement, anémie) ou de facteur de risque (âge > 50 ans) et
de la sévérité des symptômes (grade C).
Chez les malades qui présentent des symptômes digestifs de RGO non sévères ou des
antécédents d’oesophagite modérée sans endobrachyoesophage, la majorité des auteurs
recommandent d’entreprendre d’emblée un traitement médical du RGO selon les
modalités décrites au paragraphe traitement (grade C).

1.5.8. En cas d’orientation diagnostique cardiologique
Une suspicion d’insuffisance ventriculaire gauche en présence d’une toux d’effort
associée à une dyspnée d’effort, une orthopnée, une tachychardie et d’éventuelles
anomalies auscultatoires justifient une consultation spécialisée (grade C).
1.5.9. En cas d’orientation diagnostique allergique

Devant un contexte anamnestique évocateur, les tests multi-allergéniques représentent
l’approche diagnostique initiale. S'ils sont positifs, une consultation spécialisée
allergologique est alors recommandée, afin d'effectuer un bilan avec des tests cutanés
aux pneumallergènes communs (acariens, pollens, phanères d'animaux, moisissures).
Le dosage d’IgE spécifiques au hasard n’est pas recommandé. Les tests unitaires vis-àvis
d’allergènes multiples dans un même réactif ou sur un même support (CLA) ne sont
pas des tests de dépistage. Ils ne sont pas cumulables avec les autres tests biologiques.
(grade A)

1.5.10. En cas d’orientation diagnostique comportementale
Il faut tenter d’évaluer avec la personne le retentissement émotionnel de la toux
chronique, tout en replaçant le symptôme dans le cadre du fonctionnement de sa
personnalité, le plus souvent bien connue par le généraliste. Il ne faut pas hésiter à
proposer précocément une consultation psychiatrique dans le but d’éviter une cascade
d’examens complémentaires. L’annonce de l’hypothèse diagnostique doit être expliquée
au patient, en soulignant le bénéfice thérapeutique qu’il peut en attendre et en évitant de
faire penser au patient qu’il ne présente plus d’intérêt clinique et que son symptôme est
« inventé ».

1.5.11. Aucune orientation étiologique
Si aucune cause n’est identifiée, la stratégie comprendra successivement et
indépendamment :
1) Traitement∗ d’épreuve d’une rhinorrhée postérieure occulte (grade C).
2) En cas d’échec, réalisation d’épreuves fonctionnelles respiratoires.
En cas de TVO réversible, mise en route d’un traitement* de fond de la maladie
asthmatique.
En cas d’hyper-réactivité bronchique sans TVO, traitement d’épreuve par
corticoïdes et/ou bronchodilatateurs inhalés pendant un mois.
3) En cas d'échec ou d'EFR normales, suspicion de RGO et mise en route d’un
traitement* d’épreuve antireflux. En cas de réponse au traitement, l’imputabilité du
RGO dans la toux peut être retenue.
L’utilité de l’endoscopie et de la pHmétrie oesophagienne est controversée. Ces
deux examens ne constituent pas un préalable indispensable au diagnostic et à la
mise en route du traitement antireflux. En tout état de cause, si l’endoscopie est
envisagée, elle doit être réalisée en dehors d'un traitement par les inhibiteurs de
la pompe à protons (IPP) qui masque les lésions d'oesophagite peptique.
4) Si aucun de ces traitements (à condition qu’ils aient été bien conduits et bien
suivis) ne montre d’efficacité, le groupe recommande un avis pneumologique
dans un premier temps, avant d’adresser à l’ORL et éventuellement au
gastroentérologue, en vue de réaliser des explorations de seconde ligne.
Si finalement aucune étiologie n’est identifiée et qu’une cause comportementale est
exclue, un traitement symptomatique antitussif peut être discuté si la toux est invalidante
et non productive.

1.5.12. Plusieurs causes identifiées
Certaines toux chroniques pouvant résulter de facteurs étiologiques multiples, des
associations thérapeutiques peuvent être entreprises dans un deuxième temps
(grade C).

I.2. EXAMEN ET BILAN DU MÉDECIN SPÉCIALISTE

I.2.1. Dans le cas où les éléments orientent vers une cause
ORL
2.1.1. Causes rhinologiques
 Le diagnostic de la pathologie rhinosinusienne repose actuellement sur le trépied :
interrogatoire – scanner – endoscopie endonasale. L’objectif premier est d’éliminer
une pathologie tumorale.
 Le patient présente un dysfonctionnement nasal chronique polysymptomatique. Ceci
témoigne très souvent d’une pathologie diffuse de la muqueuse nasosinusienne qui
peut être classée en trois groupes : pathologies oedémateuse, suppurante ou
croûteuse-sanieuse.
∗ traitement : se reporter au chapitre II.

Ces pathologies s’associent fréquemment à des maladies bronchopulmonaires. Un
bilan spécifique pour chacune de ces situations doit être entrepris en collaboration
avec les spécialistes concernés :
- recherche d’un asthme ou d’une hyper-réactivité bronchique et d’une allergie
dans la pathologie oedémateuse ;
- recherche de bronchectasies, d’un déficit immunitaire, d’une mucoviscidose, d’un
syndrome de dyskinésie ciliaire primitive dans la pathologie suppurante, d’une
panbronchiolite diffuse ;
- recherche d’une maladie de Wegener, d’une sarcoïdose, d’une maladie de
Churg-Strauss, dans la pathologie croûteuse-sanieuse.
Si la toux ne s’intègre pas dans ces pathologies associées, une pathologie
rhinosinusienne isolée peut être retenue : sinusite d’origine dentaire, mycoses,
rhinosinusites oedémateuses ou purulentes chroniques, ozène et autres
rhinosinusites inclassables.
 Le patient présente le syndrome rhinorrhée postérieure- toux chronique après échec
du traitement d’épreuve proposé par le médecin traitant ; deux situations peuvent
être rencontrées :
- le bilan ORL retrouve malgré cette séméiologie atypique un des trois cadres
pathologiques décrits dans le dysfonctionnement nasal chronique
polysymptomatique (voir ci-dessus)
- l’endoscopie nasale et le scanner des sinus sont normaux : on oriente l’enquête
étiologique vers les autres causes.
 Le patient présente un dysfonctionnement nasal chronique monosymptomatique
autre : parmi ceux-ci, seule une obstruction nasale chronique avec respiration
buccale mérite d’être considérée comme facteur d’entretien possible d’une toux
chronique et mérite d’être traitée

2.1.2. Causes en rapport avec les voies aérodigestives supérieures

2.1.2.i L’examen standard
L’examen à l’abaisse langue et la laryngoscopie indirecte, au miroir puis en
nasofibroscopie, le toucher pharyngien et la palpation cervicale, sont les principales
explorations à réaliser. Ils recherchent en premier lieu une anomalie pariétale, en
particulier tumorale, et une atteinte des nerfs crâniens, en étudiant la mobilité des
structures musculaires.
Ils permettent d'objectiver des signes de laryngite chronique, éventuellement à rattacher
à un reflux pharyngolaryngé (oedème, erythème, granulomes localisés à la margelle
laryngée postérieure) à partir d’un reflux gastro-oesophagien (grade C).
Lorsqu’une lésion tumorale est suspectée, une panendoscopie avec biopsies doit être
réalisée, précédée par un scanner cervical ou cervicothoracique.

2.1.2.ii Fibroscopie de la déglutition
La fibroscopie de la déglutition est le second examen à réaliser en fonction du contexte
clinique (grade C).
Le bilan sera éventuellement complété par une endoscopie au tube rigide, des
explorations radiologiques morphologiques ou dynamiques (scanner cervical et/ou
thoracique, radiocinéma pharyngo-oesophagien, transit pharyngo-oesophagien,
manométrie), une manométrie, des biopsies musculaires, une électromyographie du
larynx, un test aux anticholinestérasiques ou par un bilan neurologique.

2.1.2.iii Autres explorations
En cas de suspicion de fistule oesotrachéale, avec la fibroscopie
LOb Conseils/SFORL 15
pharyngolaryngotrachéale, l’endoscopie des voies aérodigestives supérieures est
l’examen clé du diagnostic, avec un éventuel test au bleu de méthylène et un transit
pharyngooesophagien.
La toux chronique peut être un symptôme associé à un dysfonctionnement des cordes
vocales, qui regroupe certaines pathologies comme les spasmes laryngés, les
dyskinésies laryngées, les pseudo-asthmes ou les larynx irritables. L’abaissement du
seuil de réflectivité laryngé ou trachéal est évoqué (grade C).

I.2.2. Dans le cas où les éléments orientent vers une cause
bronchopulmonaire

2.2.1. Deux investigations peuvent être demandées indifférement par le
médecin généraliste ou le pneumologue :
• La radiographie thoracique (face et profil) est indispensable dans la prise en charge
d’une toux chronique (grade C). La présence d’une anomalie radiologique dicte le
bilan spécialisé à entreprendre (grade A).
• Les explorations fonctionnelles respiratoires comportent une spirométrie avec étude
de la réversibilité en cas de TVO. L’obstruction bronchique est considérée comme
réversible si le VEMS est amélioré d’au moins 12 % et de 200 mL par rapport à sa
valeur initiale. En l’absence de TVO, la recherche d’hyperrréactivité bronchique non
spécifique fait appel à diverses substances (métacholine, carbachol ou histamine).
(grade A)

2.2.2. Deux investigations relèvent davantage d’une demande par le
pneumologue :
• Le scanner thoracique est justifié, en première intention, en cas de suppuration
bronchique chronique, et, en seconde intention, si le bilan étiologique a été négatif. Il
recherche des bronchectasies, mais peut également révéler des anomalies de
l’architecture trachéobronchique, du médiastin ou de l’interstitium pulmonaire. (grade
A)
• La fibroscopie bronchique est justifiée, en première intention, si les données cliniques
orientent vers une anomalie endobronchique, cancer notamment, (hémoptysie
associée, toux récente chez un grand tabagique). En seconde intention, si le bilan
étiologique a été négatif, elle pourrait apporter un diagnostic dans 25 % des cas
(trachéobronchopathie, broncholithiase) (grade C). Elle permet également la
réalisation de biopsies bronchiques et/ou de lavage bronchoalvéolaire, à la recherche
de granulome, d’alvéolite lymphocytaire ou éosinophilique (grade A).

2.2.3. Expectoration induite
L’expectoration induite est une technique non agressive d’évaluation de l’inflammation
bronchique qui est encore réservée à certains centres spécialisés. Elle permet la
recherche d’une éosinophilie bronchique.

I.2.3. Dans le cas où les éléments orientent vers une cause
cardiologique
L’examen clinique, la radiographie thoracique et l’ECG suffisent bien souvent au
diagnostic. En cas de doute, l’échographie cardiaque complète le bilan (grade C).

I.2.4. Dans le cas où les éléments orientent vers une cause
gastroentérologique
L’hépatogastroentérologue va discuter la réalisation de deux examens : l’endoscopie et
la pHmétrie oesophagienne.
L’endoscopie est indispensable en cas de signe d’alarme. En dehors de ce contexte, elle
est rarement contributive, du fait de la faible prévalence de l’oesophagite (grade C). Elle
est également incapable d’établir un lien de cause à effet entre toux et reflux (grade A).
La pHmétrie oesophagienne permet de démontrer une exposition acide anormale de
l’oesophage et tente de mettre en évidence une relation chronologique étroite entre
épisodes de reflux et épisodes de toux. L’examen a peu de chance d’être contributif pour
démontrer cette relation chronologique quand la fréquence journalière des épisodes de
toux est faible ou au contraire très élevée. Chez les malades vus en dehors de tout
traitement par IPP, l’intérêt essentiel de la pHmétrie est de leur éviter ce traitement
lorsque l’exposition acide est normale. Chez les malades continuant à tousser sous
traitement IPP bien conduit, la pHmétrie sous traitement vise à démontrer la persistance
d’un reflux acide justifiant l’augmentation des doses.
Le rôle des reflux non acides ou faiblement acides dans la survenue d’une toux est
controversé. La pHmétrie n’est pas capable de les mettre en évidence (grade B).
L’impédancemétrie intraluminale oesophagienne, seule technique permettant leur
identification est encore réservée à des centres spécialisés.

I.2.5. Dans le cas où les éléments orientent vers une cause
allergique
Lorsque l’interrogatoire permet d’évoquer l’origine allergique d’un asthme ou d’une
rhinite, les tests peuvent être utiles pour identifier un ou plusieurs pneumallergènes.

2.5.1. Les tests cutanés d’allergie
Les tests cutanés sont très précis et fiables, si on les réalise de façon standardisée.
L'appréciation de leur positivité immédiate doit se faire par rapport à un témoin positif et
à un témoin négatif. Toute positivité du témoin négatif signe un dermographisme et
empêche l’interprétation des prick tests. Les antihistaminiques doivent être arrêtés
quelques jours avant la réalisation des tests. L'équation tests cutanés positifs = allergie
n'est pas exacte car plus de 25 % des sujets (d’une population générale) ont des tests
cutanés positifs sans aucune symptomatologie clinique.

2.5.2. Dosage des IgE spécifiques sériques
Le dosage des IgE totales n'a aucune valeur dans le diagnostic de la composante
allergique d'une toux. Ce n’est pas un test de dépistage.
Le dosage des IgE spécifiques ne saurait être réalisé en première intention ou même
systématiquement. Leur recherche est surtout intéressante lorsqu'il existe une
discordance entre l'allergène cliniquement suspecté et les résultats des tests cutanés,
lorsque l'on veut rechercher une sensibilisation à un allergène rare, non disponible en
test cutané ou lorsque les tests cutanés sont irréalisables (dermatose étendue) ou
ininterprétables (traitement anti-histaminique impossible à arrêter).

I.2.6. Dans le cas où les éléments orientent vers une cause
comportementale
Il n’existe pas de « test » d’orientation, seul l’entretien (qui parfois a lieu avec la
présence du médecin traitant) permet de progresser.

II. PLACE ET EFFICACITE DES DIFFERENTS

TRAITEMENTS DE LA TOUX

II.1. LES ANTITUSSIFS
Les antitussifs∗ ne sont indiqués que dans les toux invalidantes, non productives,
d’étiologie non aisément accessible à un traitement curatif ou sans étiologie déterminée.
Les antitussifs ont un service médical rendu modéré, souvent faible ou insuffisant. Leur
prescription suppose d’en avoir pesé le rapport bénéfice-risque, compte tenu d’effets
secondaires non négligeables.

II.2. TRAITEMENTS SPÉCIFIQUES

II.2.1. TRAITEMENT DES DYSFONCTIONNEMENTS
NASOSINUSIENS CHRONIQUES
Actuellement en France, il n’y a aucune étude permettant de valider l’efficacité d’un
traitement dans la rhinorrhée postérieure chronique. En pratique, on retrouve parmi les
traitements prescrits les lavages des fosses nasales au sérum physiologique, les
corticoïdes locaux, les antihistaminiques (locaux ou systémiques). Des études anglosaxonnes
proposent l’association anti-H1 de première génération (bromphéniramine 6
mg x 2/j) - décongestionnant (pseudoéphédrine 60 mg x 3/j) (grade C). La pharmacopée
française référence ces principes actifs dans d’autres AMM. Ils ne sont pas dénués
d’effets secondaires. Leur utilisation hors AMM impose le respect strict de leurs contreindications.
En dehors de certaines sinusites chroniques bactériologiquement documentées pouvant
se révéler par une rhinorrhée postérieure isolée, la prescription d’un traitement
antibiotique n’est pas recommandée.
La place et l’efficacité du traitement des autres causes de dysfonctionnement
nasosinusien chronique dans la prise en charge de la toux n’a fait l’objet d’aucune
publication spécifique, mais mériterait d’être évaluée.

II.2.2. TRAITEMENT DES TROUBLES DU CARREFOUR
AERODIGESTIF
Les traitements des troubles du carrefour sont rarement médicamenteux, en dehors des
myosites et polymyosites où la corticothérapie et les immunoglobulines sont indiqués, et
de la myasthénie. La fréquence et le retentissement pulmonaire des fausses routes
déterminent les modalités thérapeutiques.
Les mesures de rééducation de la déglutition et de la phonation (manoeuvres posturales,
travail sur les temps réflexes, adaptation des textures) doivent souvent s'accompagner
d'une kinésithérapie respiratoire.
∗ La liste des antitussifs disponibles en France est donnée dans le texte long
(référence à venir).

II.2.3. TRAITEMENT DES LARYNGITES
Le but essentiel du traitement des laryngites est d’agir sur les causes et les facteurs
favorisants.
En cas de lésions laryngées évocatrices de reflux, un traitement antireflux peut être
proposé en première intention. Le bénéfice apporté par ce traitement est inconstant et
reste à évaluer.

II.2.4. TRAITEMENT DE L’ASTHME ET DE L’HYPERREACTIVITE
BRONCHIQUE NON SPÉCIFIQUE

2.4.1. Le traitement de la toux chronique associée à un TVO réversible,
correspondant habituellement à un asthme persistant léger à modéré,
comporte 3 mesures :
• Les corticoïdes inhalés qui visent à contrôler l’inflammation bronchique, représentent
le principal traitement de fond de l’asthme persistant, les doses quotidiennes (200 à
1000 μg) variant avec la sévérité de l’asthme.
• L’éviction ou l’évitement d’un allergène, identifié comme facteur déclenchant ou
aggravant par l’analyse clinique, les tests cutanés, parfois aidés des tests
biologiques, est possible pour la plupart des allergènes domestiques, plus difficile
voir impossible à obtenir pour les autres. En cas d’échec de cette mesure,
l’immunothérapie ou désensibilisation spécifique, réservée aux seuls asthmes
stables, intermittents ou persistants légers, peut être discutée au cas par cas et en
absence de polysensibilisation antigénique.
• Les bronchodilatateurs qui visent à lever le bronchospasme comprennent 2 familles :
les bêta-2 stimulants inhalés d’action brève (fénotérol, pirbutérol, salbutamol,
terbutaline) ne sont indiqués que ponctuellement en cas de symptômes aigus ; les
bêta-2 stimulants inhalés d’action prolongée (salmétérol, formotérol) ne sont indiqués
qu’en traitement de fond d’appoint des corticoïdes inhalés ; corticoïdes et bêta-2
stimulants d’action prolongée peuvent d’ailleurs être associés dans une même
préparation inhalée (salmétérol + fluticasone ; formotérol + budésonide).
• Les autres thérapeutiques, qu’il s’agisse de la théophylline à libération prolongée ou
des anti-leucotriènes, constituent une alternative en cas d’asthme persistant léger :
les anti-leucotriènes doivent être associés aux corticoïdes en cas d’asthme persistant
modéré.
• La prise en charge repose également sur l’éducation du patient et son suivi médical
régulier visant à apprécier le contrôle de l’asthme. Ce contrôle est jugé satisfaisant
lorsque, les symptômes diurnes et nocturnes ont disparu, le débit de pointe est
normalisé et stable, le patient ne ressent plus le besoin de prendre des beta-2
stimulants d’action brève, le patient a la sensation de mener une vie normale.

2.4.2. Le traitement de la toux chronique associée à une hyperréactivité
bronchique non spécifique repose sur les corticoïdes et/ou les
bronchodilatateurs inhalés.
S’il s’agit d’une toux équivalent d’asthme, ce traitement doit être efficace en moins d'un
mois.

II.2.5. TRAITEMENT DE L’ALLERGIE
Selon l’expression clinique dominante, le traitement médicamenteux est celui d’un
asthme allergique ou d’une rhinite allergique.
Lorsqu’un allergène est identifié et un traitement spécifique prescrit (mesures d’éviction)
il est d’usage d’évaluer déjà son efficacité à 4 semaines (grade A). Cependant l’efficacité
des mesures d’éviction et de l’immunothérapie ne peuvent réellement s’apprécier
qu’après 6 mois voire au moins 2 saisons allergéniques.

II.2.6. TRAITEMENT DU RGO
L’effet des recommandations hygièno-diététiques n’est pas établi. Les mesures
posturales sont proposées dans les reflux nocturnes. Les IPP constituent le traitement
de première intention en commençant d’emblée avec une dose double de celle
recommandée dans le traitement des oesophagites, répartie en deux prises, matin et
soir. La coprescription d’un prokinétique est logique d’un point de vue pharmacologique
mais le bénéfice n’est pas établi. La durée initiale du traitement est de 2 mois. Il n’y a
aucun argument qui démontre que la poursuite du traitement au delà de 2 mois permet
d’augmenter les taux de réponse. Si la toux est bien contrôlée sous traitement, il est
raisonnable de proposer une « fenêtre thérapeutique » pour évaluer le risque de
rechute, la rapidité de la récidive et la dépendance au traitement anti-reflux. En cas de
rechute le maintien d’un traitement continu est indiqué en recherchant la dose d’IPP
minimale efficace.
La persistance de la toux au-delà du 2ème mois de traitement est parfois liée à un
contrôle insuffisant de l’acidification oesophagienne. En cas de persistance d’une
exposition acide et a fortiori s’il existe une relation temporelle de la toux et des reflux
acides (pHmétrie sous traitement), certains recommandent d'augmenter la dose d’IPP.
D’autres facteurs doivent être recherchés et pris en compte, en particulier le syndrome
d’apnée obstructive du sommeil qui aggrave le RGO nocturne (grade C).
Un traitement chirurgical antireflux peut être envisagé si les symptômes respiratoires
sont invalidants et récidivants à chaque tentative d’arrêt du traitement médical anti-reflux.
Ce traitement ne peut être préconisé que chez les malades à faible risque opératoire
ayant un RGO prouvé et dont la responsabilité sur les symptômes est fortement
suspectée sinon prouvée.

II.2.7. TRAITEMENT DES TROUBLES DU COMPORTEMENT ET
DE LA PERSONNALITE
Il faut tenter de comprendre le sens et le but du maintien du symptôme « toux », évoquer
l’absence prouvée de maladie organique et avec l’accord de la personne et en fonction
des nécessitées contacter l’entourage en tenant compte des antécédents. L’explication
des possibilités thérapeutiques (médicaments et psychothérapie) est indispensable.
Un traitement médicamenteux, par anxiolytiques ou antidéprésseurs, peut être initié
durant une courte période. A long terme, le résultat dépend de l’acceptation et de la
qualité de la relation thérapeutique à propos du symptôme « toux ».

CONCLUSION

La toux chronique est un motif fréquent de consultation. C’est un symptôme banal qui peut révéler des pathologies nombreuses et variées. L’objectif primordial doit être la recherche de la pathologie causale. Ce document propose une démarche méthodique basée sur la recherche de signes d’appel. Il découle de chaque situation clinique une stratégie de prise en charge qui débute chez le médecin généraliste, et si nécessaire conduit à un bilan spécialisé. La hiérarchisation et la chronologie des investigations complémentaires et des tests thérapeutiques sont essentielles pour une prise en charge optimale en termes de rapports bénéfice/risque et coût/efficacité.

La prise en charge d'une toux chronique repose le plus souvent sur une évaluation clinique, sans recours systématique à des examens complémentaires. Elle permet d'introduire la notion de tests thérapeutiques, tests qui semblent en effet supérieurs à des batteries d'examens complémentaires. Le médicament peut donc être considéré comme un outil diagnostique. Mais pour ce faire il est impératif de développer et de disposer rapidement d'outils d'évaluation du symptôme toux chronique (méthode d'enregistrement sur 24 heures, autoquestionnaire...). Ce n'est qu'à cette condition que les tests thérapeutiques pourront être validés comme outils diagnostiques et que les schémas thérapeutiques proposés dans cette recommandation pourront reposer sur des études contrôlées.

Essais thérapeutiques

Les recommandations proposées ont été classées en grade A, B ou C selon un niveau de preuve scientifique décroisssant, en accord avec le guide d’analyse de la littérature et de gradation des recommandations, publié par l’ANAES (Janvier 2000) :
Niveau de preuve scientifique fourni par la littérature Force des recommandations

Niveau 1
Essais comparatifs randomisés de forte puissance
Méta-analyse d’essais comparatifs randomisés
Analyse de décision basée sur des études bien menées
Grade A
Preuve scientifique établie

Niveau 2
Essais comparatifs randomisés de faible puissance
Etudes comparatives non randomisées bien menées
Etudes de cohorte
Grade B
Présomption scientifique

Niveau 3
Etudes cas-témoins
Essais comparatifs avec série historique

Niveau 4
Etudes comparatives comportant des biais importants
Etudes rétrospectives
Séries de cas
Etudes épidémiologiques descriptives
(transversale, longitudinale)
Grade C
Faible niveau de preuve
scientifique

Cette classification a pour but d'expliciter les bases des recommandations. En l'absence de précision, les recommandations proposées correspondent à un accord professionnel (dégagé au cours d'échanges entre les membres du Groupe de Travail).
L'absence de niveau de preuve doit inciter à engager des études complémentaires lorsque cela est possible. Cependant, l'absence de niveau de preuve ne signifie pas que les recommandations élaborées ne sont pas pertinentes et utiles (exemple de l'efficacité de la mastectomie dans le cancer du sein, des antibiotiques dans l'angine,...).