21.11.09

ANAES

Les recommandations pour la pratique clinique ont été élaborées conformément aux règles méthodologiques préconisées par l'Agence Nationale d’Accréditation et d’Évaluation en Santé (ANAES) qui leur a attribué son label de qualité.

Les recommandations proposées ont été classées en grade A, B ou C selon les modalités suivantes :
• Une recommandation de grade A est fondée sur une preuve scientifique établie par des études de fort
niveau de preuve (essais comparatifs randomisés de forte puissance et sans biais majeur, méta-analyse,
analyse de décision, ...) ;
• Une recommandation de grade B est fondée sur une présomption scientifique fournie par des études de
niveau intermédiaire de preuve (essais comparatifs randomisés de faible puissance et/ou comportant des
biais, ...) ;
• Une recommandation de grade C est fondée sur des études de faible niveau de preuve (essais comparatifs
non randomisés avec groupe contrôle historique, séries de cas, ...) ;
• En l'absence de précision, les recommandations proposées correspondent à un accord professionnel.
Cette classification a pour but d'expliciter les bases des recommandations. L'absence de niveau de preuve
doit inciter à engager des études complémentaires lorsque cela est possible ; cependant l'absence de niveau
de preuve ne signifie pas que les recommandations élaborées ne sont pas pertinentes et

La nouvelle insuffisance vertébro-basilaire

La question posée est de savoir s’il est utile de rechercher des anomalies de l’artère vertébrale par angioIRM dans les vertiges positionnels ou lors d’accès de pseudoébriété lorsque ces deux symptômes ne sont pas associés à des signes neurologiques.
L’étude rétrospective en double aveugle a porté sur 258 comptes-rendus d’angioIRM qui avaient été demandées pour toutes sortes de raisons dont les 3 principales étaient : un accident ischémique, une pathologie carotidienne ou un anévrysme cérébral. Ces comptes-rendus ont été divisés en deux groupes : le groupe A où la description des artères vertébrales ne montrait aucune anomalie et le groupe B où au moins une artère vertébrale était sténosée ou hypoplasique (moins de 1 mm de diamètre). Chez 133 d’entre eux, il a pu être déterminé :
1°) s’ils avaient présenté des vertiges positionnels ou des accès de pseudoébriété isolés au moment ou depuis l’examen ;
2°) s’il y avait des facteurs de risque vasculaire et combien (Tableau I).
Finalement, le groupe A comptait 72 patients avec des artères vertébrales normales et le groupe B comptait 61 patients avec des anomalies des artères vertébrales. En stratifiant les facteurs de risque vasculaires, on s’aperçoit que chez les patients du groupe B qui avaient au moins 3 facteurs de risque vasculaire, 85% avaient présenté des vertiges positionnels isolés ou des accès de pseudoébriété (p=.026). Les calculs montrent que la valeur de cette constatation vaut tant pour le diagnostic positif que négatif.

La conclusion des auteurs est que les patients qui se plaignent de vertiges positionnels isolés et/ou d’accès de pseudoébriété inexpliqués et qui ont au moins trois facteurs de risque vasculaire, ont probablement une insuffisance vertébro-basilaire. Il y a donc un risque accru de survenue d’un accident vasculaire cérébral dans la fosse postérieure. Pour confirmer ce risque, ils recommandent donc de faire une étude radiographique du système vertébro-basilaire par angioIRM (sensibilité de 94%) plutôt que par Dopler (sensibilité 70%). Pour l’artériographie intra-artérielle, la sensibilité est de100%.

Prise en charge des surdités brusques

Prise en charge des surdités brusques : vers une conférence de consensus ?
Rapporté par Emilie Vormès (Vincennes) d'après la communication :
Prise en charge des surdités brusques (Pr. B. Fraysse, Dr. D.Bouccara) – 19 novembre 2004
OTO-FORUM, Tours 2004

Animé par le Pr. Fraysse (hôpital Purpan, Toulouse) fort d’une étude sur 400 patients et le Dr. D. Bouccara, (hôpital Beaujon, Paris) l’atelier sur la prise en charge thérapeutique des surdités brusques a reçu la visite rapide du Pr. Robier (hôpital Bretonneau, Tours) En plus de la comparaison des moyens mis en œuvre dans les 3 services ainsi représentés, de nombreuses questions des participants ont permis d’entamer une réflexion sur ce qui ne relève que d’habitudes liées à des traitements peut- être obsolètes et ce qui présente un intérêt réel.
Ainsi de l’hospitalisation : A Toulouse, le protocole comprend une hémodilution systématique (sauf en cas d’atteinte sélective sur les fréquences graves), ce qui nécessite une hospitalisation. A Beaujon, où l’hémodilution ne se pratique pas, la corticothérapie de première intention est prescrite en ambulatoire. Ce n’est qu’en absence d’amélioration sous 48 heures que l’hospitalisation est demandée. A Tours, l’hémodilution a été abandonnée par manque d’efficacité mais l’hospitalisation est restée, apparemment par habitude. Tous s’accordent néanmoins sur le fait que l’hospitalisation permet de limiter le nombre de patients « perdus de vue ».
A Beaujon, pas de caisson hyperbare, à Tours, le Pr. Robier est circonspect quant à son utilisation après plusieurs cas de baro-traumatismes, à Toulouse, il fait partie du protocole.
Pour l’exploration des surdités brusques, le bilan biologique, audiométrique et VNG fait l’unanimité. En revanche, dans le bilan pratiqué à Beaujon, l’IRM est systématique chez les patients de moins de 60 ans. L’étude du rapport coût/efficacité a conduit le Pr. Fraysse à plaider en faveur des PEA,- tout en rappelant que, pratiqués trop tôt, ils peuvent aggraver la surdité- et à réserver l’IRM pour un deuxième temps.
Et si Mrs. Fraysse et Bouccara sont d’accord sur une prise en charge efficace et de bon pronostic pendant les 14 jours suivant la surdité, on se souvient que le Pr. Tran Ba Huy considère que seules les 6 premières heures sont décisives.
Malgré toutes les difficultés éthiques posées par leur réalisation, on voit donc que des études randomisées sont nécessaires pour parvenir à réunir –ainsi que le souhaite le Pr. Fraysse- une conférence de consensus qui évaluera les besoins des patients, les options thérapeutiques et les contingences économiques.

pensez aussi au bilan sanguin

Déficits cochléovestibulaires à répétition : pensez aussi au bilan sanguin

Par Vincent Patron (CHU de Limoges)

Patiente âgée de 75 ans hospitalisée au mois d’avril 2008 pour une suspicion de névrite vestibulaire droite. Dans ses antécédents, on notait une leucémie aiguë myéloblastique connue depuis 2005, pour laquelle elle avait reçu une chimiothérapie 2 mois avant. L’examen clinique montrait un syndrome vestibulaire harmonieux et aucun signe neurologique associé. Une TDM cérébrale avait été réalisée car la patiente se plaignait de douleurs occipito-pariétales droites. Elle s’était avérée normale.
Les épreuves caloriques montrèrent une hyporéflexie droite (figure 1), et l’audiogramme une surdité de perception bilatérale et symétrique (figure 2). Une IRM fut réalisée et considérée comme normale. Le diagnostic de névrite vestibulaire droite fut posé et la rééducation débutée.



Huit jours après sa sortie d’hospitalisation, la patiente présenta une perte auditive droite, mais elle ne consulta pour cela que 2 mois plus tard (juin 2008) (figure 3). Deux hypothèses furent émises alors : 1) syndrome cochléo-vestibulaire droit déficitaire dans le cadre de sa LAM ; 2) multinévrite zostérienne.

En novembre 2008, lors d’une cure de chimiothérapie dans le cadre de sa LAM, la patiente présenta une surdité brusque gauche suivie le lendemain d’une grande crise vertigineuse rotatoire (durée 48 heures). L’examen montra un syndrome harmonieux gauche, les épreuves caloriques une forte hyporéflexie bilatérale (figure 4), et l’audiogramme une surdité de perception sévère bilatérale (figure 3). Le diagnostic de syndrome cochléo-vestibulaire gauche déficitaire induit par la LAM fut retenu.



Peu d’articles relatent l’association de syndromes cochléaires et/ou vestibulaires et d’hémopathies (leucémies, myélomes multiples, Waldenström…). La physiopathologie semble relever de 3 mécanismes :
- l’hyperviscosité ou leucostase (leucémies myéloïdes chroniques en phase chronique) ;
- l’infiltration labyrinthique (leucémies aiguës et myéloïdes chroniques en phase d’acutisation) par des dépôts de cellules leucémiques dans l’oreille interne chassée par la chimiothérapie puis remplacée par une fibrose (surdités progressives) ;
- l’hémorragie intralabyrinthique (leucémies aiguës et myéloïdes en phase d’acutisation).
Aucun traitement n’est consensuel : leucophérèse et/ou chimiothérapie à haute dose ont été proposées et permettraient une récupération partielle. Ce cas clinique doit nous rappeler que, pour tout syndrome cochléaire ou vestibulaire, un bilan biologique minimum doit être réalisé et contenir une formule sanguine.

L’artère vertébrale

L’artère vertébrale, cette mal-aimée

Par Jean-Pierre Sauvage (CHU de Limoges)

Comme beaucoup de cadets, l’artère vertébrale souffre de la domination de l’artère carotide, son aînée. Pourtant, le système vertébro-basilaire est impliqué dans 20% des accidents vasculaires cérébraux et parmi ceux-ci, 25% sont en rapport avec une sténose de l’artère vertébrale. C’est vrai qu’autour de cette artère, tourne la dialectique éculée du vertige vasculaire par insuffisance vertébro-basilaire (IVB) et de ses rapports avec la colonne cervicale. Mais peut-on reprocher à l’artère vertébrale d’avoir voulu se singulariser, comparée aux symptômes visuels d’une sténose carotidienne « en majesté » ?

L’insuffisance vertébro-basilaire pourrait bien revenir sur le devant de la scène.
Car même si les « Bons esprits » la nient, il est indubitable qu’un grand nombre d’accidents vasculaires cérébelleux et du tronc cérébral est précédé de vertiges isolés dans les semaines ou les mois qui précèdent. [1,2] C’est la nouvelle IVB, celle qui accompagne les facteurs de risque vasculaire et qui se manifeste par des vertiges positionnels inexpliqués. Celle qui justifie une imagerie à la recherche d’anomalies de la circulation cérébrale postérieure : hypoplasie ou sténose de l’artère vertébrale.

Certes, s’il y a une bonne circulation collatérale, un simple hypoplasie vertébrale unilatérale est incapable de provoquer à elle seule une ischémie transitoire. Mais lorsque les anomalies deviennent bilatérales ou lorsque l’artériosclérose gagne l’artère cérébelleuse antéro-inférieure, l’ischémie touche le noyau vestibulaire et la zone d’entrée du nerf cochléovestibulaire par les perforantes ou directement le labyrinthe par l’artère labyrinthique.

Peut-on espérer repérer ces patients avant l’infarctus ? Non, tant que VNS et VNG seront faits en dehors des périodes symptomatiques et que le polygone de Willis a tout provisoirement compensé. En revanche, chez un patient qui a des facteurs de risque vasculaires et qui présente de petits vertiges inexpliqués, une constellation de nystagmus positionnels verticaux purs, véritable « signe du croisement au fond d’œil » de l’oreille interne, devraient pousser à demander des investigations non invasives à la recherche d’anomalies de l’artère vertébrale et du tronc basilaire (voir l’analyse de l’article de Sami Pierre Moubayed dans la livraison de la newsletter n°14).

sumatriptan

Par Anne Donnet (AP-HM, La Timone)
Article commenté :
Unpublished clinical trials with sumatriptan
Tfelt- Hansen PC
Lancet 2009 Oct 31;374(9700):1501-2.
► Retrouvez l’abstract en ligne

Tfelt-Hansen, à la recherche des résultats d’un essai comparant sumatriptan 25 mg suppo versus ergotamine 2 mg associé à la caféine, s’est plongé dans les registres du laboratoire GSK à la recherche de tous les essais cliniques non publiés.
Dans le registre concernant le sumatriptan, 182 études n’ont pas été publiées. En particulier cinq études comparatives entre sumatriptan et un autre traitement de crise (association paracétamol et métoclopramide ou tartrate d’ergotamine et caféine) n’ont pas été publiées.
Ces études, qui remontent aux années 90 (moment de lancement du sumatriptan) démontraient pour les essais utilisant le sumatriptan 100 mg par voie orale que seul dans 1 essai, plus de 50% des patients avaient un soulagement de la crise ; dans l’essai sumatriptan par voie rectale versus ergotamine, l’efficacité du sumatriptan était nettement inférieure à l’ergotamine.

Il n’est pas question de remettre en cause l’avancée clinique qui a été obtenue avec l’arrivée sur le marché des traitements de crise de la classe des triptans, mais cette nouvelle note courte de Tfelt- Hansen pointe un problème fondamental : la non-publication systématique de tous les essais cliniques.
Il incombe à la fois à l’industrie pharmaceutique, mais également aux investigateurs de publier systématiquement les essais cliniques quelque soient leurs résultats.

20.11.09

migraine cataméniale

Cette analyse « post hoc » a évalué le frovatriptan en traitement préventif de courte durée chez des femmes présentant des migraines exclusivement en association avec les règles, c’est-à-dire survenant deux jours avant ou trois jours après le premier jour des règles, sans crise de migraine en dehors de cette période.
Les femmes ont reçu chaque traitement (placebo, frovatriptan 2,5 mg une fois par jour, frovatriptan 2,5 mg deux fois par jour) une fois pendant les trois périodes péri-menstruelles et ceci dans un ordre randomisé. Cent soixante dix-neuf femmes ayant des migraines cataméniales pures ont été sélectionnées.
Significativement, moins de femmes ont présenté des migraines cataméniales lorsqu’elles sont traitées avec le frovatriptan deux fois par jour (37,7% p<0.001) ou une fois par jour (51,3% p=0.002), que lorsqu’elles sont traitées avec du placebo (67,1%). La dose de frovatriptan reçue influe significativement sur l’efficacité (2 fois par jour versus 1 fois par jour p=0.01). Des différences significatives sont aussi trouvées pour les autres paramètres d’efficacité, mais ces résultats doivent être interprétés avec précaution dans la mesure où il s’agit d’une analyse « post hoc ».
Le frovatriptan a été bien toléré et la plupart des effets secondaires sont similaires à ceux rapportés dans les autres études avec le frovatriptan ; les plus communs d’entres eux sont les nausées, les vertiges et les céphalées.
Les auteurs concluent que le frovatriptan, en traitement préventif de courte durée, réduit significativement la survenue de la migraine mensuelle chez les femmes qui présentent des crises exclusivement en association avec les règles.